« La Cenerentola » de Rossini sous le regard singulier de Guillaume Gallienne

« La Cenerentola » de Rossini sous le regard singulier de Guillaume Gallienne

L’éclectique sociétaire de la Comédie-Française Guillaume Gallienne met en scène pour la première fois un opéra.  Stéphane Lissner a naturellement pensé à lui pour la nouvelle production de la Cenerentola de Rossini dont le thème de la famille et son exutoire, sont en corrélation avec ses sources d’inspiration.

On se souvient de son film “Les Garçons et Guillame, à table” récompensé par un césar, adapté de sa pièce de théâtre éponyme, et inspiré de sa propre quête d’identité auprès d’une mère fantasque.

Le feu sous la glace 

La Cenerentola est créée d’après le conte Cendrillon de Perrault et raconte en deux actes l’histoire d’une jeune fille humiliée, déconsidérée par ses sœurs et son beau père, mais qui va conquérir le futur roi et devenir son épouse.

Dans la version lyrique du livret de Ferretti, le conte se détache du merveilleux après quelques ajustements opérés par Rossini.

En effet, la fée est remplacée par un philosophe-mendiant qu’Angelina (Cendrillon) prend en pitié et qui, récompensée de sa bienveillance, se verra invitée au bal. Il n’y a pas non plus de carrosse-citrouille et, au lieu de perdre une pantoufle, Angelina donne un bracelet au prince. Enfin, la marâtre a pris les traits d’un beau-père aussi pervers que terrible.

Avec son mélange de gravité et d’humour, l’opéra offre des passages comiques (quiproquos, travestissements..) et profonds (brûlure des sentiments, réflexion sur les apparences, l’hypocrisie, la justice et le pardon …) où l’altérité se dispute à la cruauté du jeu social.

Guillaume Gallienne manie avec aisance la truculence de la Commedia dell’arte à l’abri d’une caractérisation des personnages et la dramaturgie qui accompagne l’humiliation et la prise de conscience d’une jeune femme rejetée par les siens, en recherche de reconnaissance et prête à provoquer son destin.

Don Magnifico (Alessandro Corbelli) apporte une vraie bouffonerie à son personnage de beau-père mal dégrossi au contentement excessif mais aussi un vrai malaise qui n’a aucune conscience de sa grossièreté.

Clorinda (Chiara Skerath) et Tisbe (Isabelle Druet) sont deux petites pestes persifleuses et un peu idiotes tandis Angelina (Marianne Crebassa) émouvante, est prisonnière de son mal être.

Sur scène, l’action est transposée à Naples et s’ouvre sur un palais décati aux ocres originels (scénographie très réussie d’Eric Ruf) et une cour intérieure où la vie s’écoule dans une forme d’urgence et d’impudeur.

A l’édifice se substitue une vaste étendue de cendres au sol qui a envahi une partie du rez-de-chaussée. Cette lave solidifiée marque son emprise et sa menace jusqu’à la prochaine catastrophe. Elle renvoie à la fin du premier acte qui fait état d’une éruption sous la terre et à cette colère sourde et intérieure de l’héroïne qui couve sous les brimades.

La distribution vocale et équilibrée est portée par un magnétique Adam Plachetka dont la voix puissante et ample dans les graves épouse à merveille la virtuosité rossinienne. Quant à Marianne Crebassa dans le rôle titre, elle offre une vocalise tout en relief où sa voix ronde et voluptueuse avec ses aigus limpides confère une vraie dimension à son personnage.

 

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Dates : du 23 novembre au 26 décembre 2018 l Lieu : Palais Garnier  (Paris)
Metteur en scène : Guillaume Gallienne

NOS NOTES ...
Originalité
Scénographie
Mise en scène
Chant
Amaury Jacquet
Si le droit mène à tout à condition d'en sortir, la quête du graal pour ce juriste de formation - membre de l'association professionnelle de la critique de théâtre de musique et de danse - passe naturellement par le théâtre mais pas que où d'un regard éclectique, le rédac chef rend compte de l'actualité culturelle.
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