Nymphomaniac – volume 1, un film de Lars Von Trier

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Sortie : 1 janvier 2014

Durée : 1h50

Avec : Charlotte Gainsbourg, Stellan Skarsgard, Stacy Martin, Shia LaBeouf

La salle de cinéma en ce jour de sortie de Nymphomaniac est remplie, comme pour prouver que s’il n’y a bien qu’une chose qui dirige le monde et intéresse les gens c’est le sexe.

Synopsis :

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La folle et poétique histoire du parcours érotique d’une femme, de sa naissance jusqu’à l’âge de 50 ans, racontée par le personnage principal, Joe, qui s’est auto-diagnostiquée nymphomane. Par une froide soirée d’hiver, le vieux et charmant célibataire Seligman découvre Joe dans une ruelle, rouée de coups. Après l’avoir ramenée chez lui, il soigne ses blessures et l’interroge sur sa vie. Seligman écoute intensément Joe lui raconter en huit chapitres successifs le récit de sa vie aux multiples ramifications et facettes, riche en associations et en incidents de parcours.[/pull_quote_center]

Première séquence : dans une ruelle sombre, inquiétante et silencieuse qui rappellerait une toile de Chirico, un corps de femme jonche le sol. Et puis comme un électrochoc un morceau de musique métal allemande nous assourdit. Le surgissement, c’est là la clef des films de Lars Von Trier. Surgissement de musique, déclic psychologique, gros plan soudain sur un sexe de femme … Des décharges, grisantes souvent, bien plus que des chocs pervers. Ca commence donc comme un sombre conte, où les repères spatio-temporels sont brouillées. « Il était une fois on ne sait où », une femme tuméfiée, Joe (Charlotte Gainsbourg), est recueillie par un bienfaiteur, Seligman (Stellan Skarsgard). Dans ce conte, Joe sera la narratrice de sa propre histoire, une vie vouée à la sexualité (« Mea maxima vulva » comme hymne). Huit chapitres, entre allers-retours, de celle qui se dit « nymphomaniac ».

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Dans cette vie sexuelle comparée à la pêche à la ligne, Joe est l’appât conscient de ses attributs. Ce n’est pourtant pas une simple croqueuse d’homme que nous dépeint Lars Von Trier, une femme fatale à la Bette Davis. Le corps filiforme de l’actrice, la jeune Joe campée par la jolie Stacy Martin, est plus proche de celui d’un garçon que d’une vraie femme. C’est là un choix judicieux, qui tranche avec la picturalité propre au corps de la femme généreuse.

Dans Nymphomaniac, ce fameux corps est purement  anatomique, mécanique. La chair est triste, malade. Celle de Joe, celle de son père (trop oublié et pourtant génial Christian Slater), celle des hommes en général.

« J’ai commencé à voir de l’ordre dans le désordre », cette phrase prononcée par Joe éclaire la qualité de chef d’orchestre du réalisateur. Goût de l’illustration, de la mathématique, de l’hybride, Lars Von Trier joue avec ce qui fait le coeur même du cinéma : la pulsion scopique. On pense à une Une Sale Histoire où Jean Eustache déjouait aussi les attentes voyeuristes du spectateur. Un homme y raconte qu’il va dans les toilettes d’un café observer le sexe des femmes par un petit trou creusé dans la porte. Le même récit était raconté en deux temps, par deux personnes et deux tons différents. Jamais on ne voyait ces fameux sexes de femme. Chez Lars Von Trier, la crudité est visible en plus d’être audible. Mais pourtant l’effet est le même : par une habilité qui est propre au cinéaste, les attentes sont déjouées. Du sexe partout, mais aucune pornographie. Etre subtile alors même que l’on en montre beaucoup, ce n’était pas assuré.

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Nymphomaniac est emprunt de paradoxe et joue sur les antipodes : empathique et cruel, misogyne et féministe… On ne sait sur quel pied danser. Après tout, peut-être que le récit de Joe n’est que mensonges. Il y a même une part d’humour (son pic en est la scène avec Uma Thurman en mère bigote et hystérique), et de romantisme. Joe cristallise sur Jérôme (Shia Labeouf qui pour une fois cabotine à bon escient), effectuant un puzzle mental dans le train pour assouvir son fantasme (un tel à sa coupe de cheveux, un autre ses mains etc).

On retiendra la force hypnotisante de ce récit chaotique, portée par la voix délicate de Charlotte Gainsbourg qui tranche avec la crudité de ses mots. On pense à ce que lui faisait chanter son père à une époque (« l’amour que nous ne ferons jamais ensemble … »).

La fin de la première partie laisse une triste ouverture, comme la béance que Joe ne peut s’empêcher d’ouvrir aux hommes, la vulve que dessine les deux parenthèses du titre du film.

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