
Un fils face au modèle paternel

Dans La mise à mort du tétras lyre, David Combet explore la construction d’un garçon sensible, Pierre, élevé dans les montagnes par un père chasseur qui ne jure que par la virilité. L’enfant rêve de dessin et d’observation de la nature, quand le père impose fusil, rigueur et silence. De l’enfance à l’âge adulte, Pierre cherche sa voie, entre désir d’émancipation et poids d’un héritage qui l’étouffe. Les souvenirs d’adolescence, les hésitations de jeune adulte et les prises de conscience d’homme mûr se répondent dans un récit intime et universel.
Masculinité, désir et quête de soi
La force du livre tient dans la délicatesse avec laquelle Combet aborde la masculinité. Il montre la violence des injonctions – « devenir un homme » – mais aussi les doutes, la sensualité, la découverte de la sexualité, la fragilité qui se cache derrière l’apparente force. Le récit, ponctué d’allers-retours entre présent et passé, fait résonner les non-dits familiaux, les blessures d’enfance et la lente conquête de la liberté intérieure.
Une peinture au service de l’émotion
Entièrement réalisé en couleurs directes, l’album déploie des planches aux textures riches et aux couleurs organiques. La montagne, les forêts, les ciels changeants reflètent l’état d’âme de Pierre, tantôt apaisé, tantôt en tension. Les silences, les regards, la lumière deviennent des personnages à part entière, traduisant les émotions que les mots taisent.
Un roman graphique puissant et sensible
Sans pamphlet ni pathos, David Combet signe un récit d’émancipation d’une rare justesse. La mise à mort du tétras lyre questionne l’héritage, le rapport père-fils et la liberté d’être soi. Un roman graphique à la fois intime et universel, qui parle autant aux hommes qu’à toutes celles et ceux qui refusent les rôles imposés.
Extrait de la BD :
Résumé de l’éditeur :
Tu seras un homme, mon fils.
Pierre est un enfant sensible, amoureux de la nature, de l’art et bientôt des garçons. Son père, plutôt conservateur, l’emmène régulièrement camper au grand air. Il aimerait initier son fils à la chasse et très tôt, n’hésite pas à mettre un fusil entre les mains du jeune garçon. Mais Pierre ne se sent pas à sa place. Rêveur, il ne se reconnaît guère dans les valeurs virilistes. Il préfère observer, dessiner, sculpter… Avec le temps, il commence à se rendre compte qu’il est à l’opposé du fils que son père aurait aimé avoir. Et à mesure qu’il se découvre et refoule sa véritable nature, les relations entre les deux hommes se dégradent. Aujourd’hui ces souvenirs sont loin derrière lui. Pierre a la trentaine et peine à trouver sa place tant sur le plan sentimental qu’artistique. Confronté à l’errance professionnelle et au doute, sa carrière ne décolle pas. Il enchaîne les jobs alimentaires et reste spectateur de sa vie. Car pour pouvoir se révéler aux autres et à lui-même, il va lui falloir ouvrir la boîte de Pandore – se souvenir pour déconstruire son éducation et accepter son histoire. C’est seulement en faisant ce chemin escarpé, sans peur, qu’il pourra trouver un nouvel épanouissement personnel et artistique…
Comment grandir aux côtés d’un père déconnecté de ses émotions ? Comment s’aimer et se faire une place dans le monde en laissant derrière soi l’héritage familial qui nous entrave ? David Combet déconstruit la masculinité toxique à travers le récit intime d’un fils qui se révolte pour s’accomplir. Avec ce one shot remarquable de 280 pages réalisé à la peinture acrylique, il explore la psyché de son personnage de manière profonde et interroge le rapport au corps et à la virilité. En même temps qu’une introspection, qui aborde l’intimité et le détachement, il nous donne à voir les différences sociales des années 1990 à nos jours et révèle son grand potentiel en intégrant le catalogue Glénat avec une œuvre sensible et subtile.
| Date de parution : le 24 septembre 2025 Auteur(s) : David Combet Genre : roman graphique | Editeur : Glénat Prix : 29 € Pagination : 288 pages |