Un « very film noir » dixit l’insaisissable musicien suédois.
Un bien beau film noir. Dans le premier morceau, le rythme pressant de la caisse claire donne le la : le spectateur pressent qu’il assistera à un des polars glaçants dont JJJ a le secret. Surtout que « something doesn’t feel right » ressasse l’acteur paranoïaque (Paranoïd). Mais on ne sait pas encore comment va être cuisinée notre curiosité inquiète.
Dans la salle noire, on se laisse alors porter par la succession des plans-séquences offerts par le mélancolique suédois. Jazzy, subtilement électro, parfois planant, d’autrefois pressant : bref, tout ce qu’il faut de perturbant. Entre les prises de vue, de sublimes entractes solo piano (The girl with the sun in her eyes, An empty room) nous permettent de méditer sur l’intrigante intrigue.
On ressort de la salle de cinéma un peu désorienté. Johanson a une mélodie, un rythme, des arrangements, une intonation pour chacun de nos états d’âme. Même pas besoin d’images ! Et c’est ce qui imprègne ses albums d’une justesse si troublante qui ne se consume pas le moins du monde depuis maintenant 20 ans. « Je veux que les gens qui écoutent ma musique me reconnaissent, mais je veux les surprendre en même temps. J’essaye de donner à chaque personne quelque chose qui le touche. Pour cela, je tente de mettre des mots et une mélodie sur mes pensées les plus sombres. C’est une sorte d’auto-thérapie » (Le Figaro).
On reste dans nos fauteuils moelleux jusqu’à la fin du générique, devant l’écran noir.
Bury the Hatchet de Jay-Jay Johanson, sortie le 15 septembre
En concert le 22 novembre à l’Alhambra (Paris).