Comme à la guerre, une confession de la paternité de Julien Blanc-Gras (Stock)
Nous sommes plus habitués à lire des livres sur la maternité que sur la paternité. Cette fois-ci, Julien Blanc-Gras, auteur, journaliste reporter, aborde avec beaucoup d’originalité sa propre paternité, Comme à la guerre, vécue au XXI siècle après avoir consacré un livre, In utéro, sur la maternité et sur la femme.
Son propre ressenti en tant que père
Tout se mélange dans la tête de Julien Blanc-Gras au moment où il devient père. Il devient père et il fait face en même temps aux terribles attentats de janvier 2015, à Paris. Pour son fils, il doit garder le moral. Mais comment gérer l’horreur qui le dévaste et le fait qu’il doit s’occuper de son enfant qui ne cesse de demander des soins, des câlins et des sourires. Etant journaliste, et travaillant la plupart du temps chez lui, Julien gère les petits soucis du quotidien, comme il peut ! Même si les croûtes de lait de son fils peuvent paraître dérisoires, il faut s’en occuper. L’absurdité de la vie, en quelque sorte.
Retour sur ses grands-parents
Au moment de devenir père, Julien s’aperçoit qu’il ne sait rien ou presque rien de la vie de ses grands-pères. Ils sont tous les deux décédés et il regrette amèrement de ne pas s’être intéressé à eux de leur vivant. Il aurait pu leur poser des questions. « Je l’ai mal connu, finalement, ce vieux. Je m’en veux un peu, j’aurais pu mieux faire ? Mais quand on a juste quinze ans, on n’a pas le cœur assez grand. » P.237
Comment avaient-ils vécu la guerre ? Il part alors à la recherche du moindre indice et découvre ce qu’ont vécu ses grands-pères. L’horreur jamais partagée avec les leurs. Une vie de « héros », jamais dévoilée.
Parallélisme entre la guerre et aujourd’hui
Comme à la guerre porte bien son nom. Tout au long du livre, l’auteur va publier des récits écrits par son grand-père, et raconter la jeunesse de ses aïeux au moment de la seconde Guerre Mondiale. Récits troublants de vérité. Récits intimes et courageux. Récits terribles rapportés de la vraie guerre. Récits rapportés comme un hommage à ses ancêtres qui ne s’étaient jamais mis « en avant ».
Et nous ? En 2015, sommes-nous en guerre ? Oui et non répond l’auteur.
La joie d’être père
Même si le contexte est dur, douloureux, Julien Blanc-Gras arrive à nous faire sourire et parfois plus ! Son style, très vivant, dévoile son optimisme à toute épreuve ! Le lecteur se régale de ses cartes postales envoyées à son fils dans les différents pays qu’ils traversent, pour son métier ! Et son bonheur d’être père, de découvrir son enfant grandir l’emporte largement sur toutes les horreurs perpétrées par les hommes. Même si les nuits restent difficiles, 5h d’affilée de sommeil reste un exploit, Julien Blanc-Gras découvre les joies d’être père même si ce n’est pas facile tous les jours !
» La vérité sur l’éducation des enfants : on fait au mieux, on fait ce qu’on peut. Impossible de tout contrôler, il faut accepter notre condition de parents imparfaits. » P.194
Beaucoup de parents se reconnaîtront dans les situations cocasses décrites par l’auteur !
Comme à la guerre, un livre à la fois drôle, émouvant et profond.
venais d’en créer une et la mort rôdait. L’Enfant articulait ses premières syllabes avec le mot guerre en fond sonore. Je n’allais pas laisser l’air du temps polluer mon bonheur. »
Roman d’une vie qui commence, manuel pour parents dépassés, réflexion sur la transmission, cette chronique de la paternité dans le Paris inquiet et résilient des années 2015-2018 réussit le tour de force de nous faire rire sur fond de
tragédie.