Avec le corps qu’elle a, un livre dérangeant et vrai sur la femme (Albin Michel)
Christine Orban sort un livre brûlant d’actualité, Avec le corps qu’elle a. Elle ne raconte nullement l’histoire d’un viol d’une femme, mais ce que vit cette jeune femme de vingt ans est sans doute autant traumatisant qu’un viol.
La domination perverse d’un homme
Gwendoline a onze ans quand sa maman, veuve se remarie. Pour elle, son beau-père, ancien ministre, ne sera jamais Huber (sans t), mais seulement BP. Sa mère aussi avait peur de BP. Mais jamais elle ne se révoltait. BP dominait, de façon perverse. C’était ainsi. Donc Gwendoline a subi aussi toute sa vie les remarques de son BP. Et cet homme qui se pensait surpuissant l’a complètement détruite et l’a réduite uniquement à un corps. Avec le corps qu’elle a, ça va être facile pour elle… Cette phrase va rester gravée au fond d’elle et va l’empêcher de devenir une femme épanouie. Au contraire, elle n’aura aucune confiance en elle alors que c’est une jeune femme brillante qui vient d’être publiée ! Un seul geste et une seule phrase de son BP auront suffi à détruire cette jeune femme. Une blessure psychologique invisible et enfouie au plus profond d’elle, une perte d’estime d’elle-même. Et ceci pour de nombreuses années…
Sa mère comme mauvais exemple
Chaque mot, chaque phrase, chaque situation vécue par cette jeune femme résonne en nous comme un cri de vérité. Aujourd’hui alors que la parole se délie et que des femmes crient au monde entier leurs souffrances, Christine Orban fait ressortir une vérité vraiment troublante. Comment dénoncer ce qui ne se voit pas, ce qui ne laisse aucune trace physique si ce n’est psychologique ? Il est facile de blesser quelqu’un avec seulement un mot, et encore davantage une jolie jeune femme qui a un corps qui attire tous les regards, malgré elle. Une femme réduite à l’état de corps, une simple attirance sexuelle. Ou même un morceau de corps car elle pose comme mannequin. Soit son cou soit ses pieds, soit ses mains sont photographiés. Elle est morcelée dans son corps comme dans son esprit. Même elle, elle ne se voit plus comme une personne intègre. Et l’attitude soumise de sa mère ne l’aide pas à se rebeller.
Christine Orban fait une très belle analyse d’une femme qui va parler à toutes les femmes, mais également à tous les hommes. Un beau portrait de femme, trop jolie pour avoir pu se réaliser en dehors de cette beauté toujours mise en valeur par les hommes qui l’entourent.
Avec le corps qu’elle a, un livre bouleversant qui pose les bonnes questions et qui montre d’un côté la fragilité de l’esprit humain et d’un autre la facilité du pouvoir de destruction possible… La complexité de notre condition humaine…
Ce jour d’été, au bord de la mer, aurait dû être le plus heureux de sa vie, si Beau-Père ne l’avait pas réduite à un corps dont la beauté serait le seul atout. Debout, au-dessus d’elle, il lui avait lancé devant tous les invités : « Avec le corps qu’elle a, ça va être facile pour elle… » Ces mots vont fracasser son existence pendant des années et la mener au bord du gouffre.
Dans ce roman, Christine Orban explore, avec une grande sensibilité et des accents fitzgéraldiens, les « blessures invisibles » d’une jeune femme, et sa difficulté d’être elle-même dans un monde où triomphent les apparences et la domination masculine.
Date de parution : le 1er février 2018
Auteur : Christine Orban
Editeur : Albin Michel
Prix : 18 € (234 pages)
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