De la science fiction pop allégorique avec Epiphania (Casterman)
Casterman publie Epiphania, une BD de science fiction aux puissants accents métaphoriques. L’apparition d’êtres humains d’un nouveau genre fait ressortir le meilleur et le pire de l’homme dans une intrigue qui met dos à dos humanité et chimères bientôt pourchassées par les plus intégristes. A l’exemple des la série cinématographiques X-Men, les mixbodies mélangent caractéristiques humaines et spécificité animales voire mythologiques avec des capacités physiques bien supérieures à la normale. Ludovic Debeurme réalise le dessin et le scénario d’une bande dessinées à l’esthétique très pop destinée à évoluer sur 3 tomes pour imaginer la possibilité d’une cohabitation.
Une mise en abime de notre société actuelle
Epiphania débute sur une grave crise de couple entre David Novera et son amie qui se posent des questions sur la pérennité de leur binôme, sans parler de la pertinence d’avoir des enfants. A la faveur d’un Love training camp, ils envisagent d’aborder les questions qui fâchent avec d’autres couples comme eux à la croisée des chemins, sous l’égide d’un psychanalyste expert. Mais la tragédie pointe très vite quand l’île est submergée par l’océan et les participants décimés. La BD quitte alors le simple contexte réaliste d’un David seul survivant devant continué à vivre pour insérer une bonne dose de science fiction. Car au même moment sortent de terre de petits êtres à l’origine inconnue et à l’apparence humaine, mais pas que. Tels des petits champignons issus du centre de la terre, ils poussent et revêtent des signes distinctifs bien particuliers. Ce point de départ très original laisse imaginer une bande dessinée qui pourrait partir dans tous les sens. Ludovic Debeurme choisit d’abord de développer une intrigue au plus proche de la réalité, avec la question de l’insertion de ces êtres différents dans une société un peu effrayée par leur existence. Le héros David lui-même va pouvoir laisser libre cours à son instinct paternel en prenant sous son aile ce qui ressemble à un Faune qu’il va dénommer Kojika.
Une BD qui interroge sur nous-même
La fête chrétienne de l’épiphanie est censée célébrer la venue du messie qui reçoit la visite et l’hommage des rois mages. Ce même messie qui est finalement crucifié. La métaphore n’est pas loin dans le choix du titre de la série, ce que confirme la couverture du premier album aux forts accents théologiques. Ludovic Debeurme n’y va pas par 4 chemins pour imaginer une humanité confrontée à ses démons. Xénophobie, chasse aux sorcières et choc des civilisations apparaissent en filigrane dans une BD qui interpelle et interroge sur nous-mêmes. A l’heure où un président américain clivant excite les divergences dans un contexte mondial tendu, Epiphania tente le pari de la symbolique lourde de sens. A contrario, le héros David ressemble à monsieur tout le monde malgré son look un peu baba et son métier de guitariste rock. Les questions qu’il se pose renvoient à nous mêmes avec une quête de sens qui l’anime tout du long. Et quand le petit Koji devient grand, l’accentuation de ses caractéristiques physiques exacerbe les tensions avec ses semblables.
Une série qui débute fort avec une mise en route qui multiplie les questions ouvertes. D’où viennent ces êtres issus de la terre? Comment pourront-ils cohabiter avec l’humanité? Vivement le second tome prévu en janvier 2018!
Date de parution : Septembre 2017
Scénariste(s) : Ludovic Debeurme
Dessinateur(s) : Ludovic Debeurme
Genre : Anticipation, Science Fiction
Editeur : Casterman
Prix : 22 € (120 pages)
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