4h15 de film, il faut être motivé pour suivre cette dissolution du mariage entre une actrice et son metteur en scène dans le Paris de l’après 1968. Hyper réalisme, banalité du quotidien, scènes de répétition d’Andromaque de Racine et des scènes de la vie de couple entre Sébastien et Claire à l’extérieur du théâtre, le tout bien mélangé aboutit à un psychodrame qui divise. Truffaut y voyait un sommet de la Nouvelle Vague, d’autres y voient au contraire un film nombriliste facile et paresseux. Ne reste plus qu’à vous faire votre opinion!
L’amour en fuite
Jean-Pierre Kalfon et Bulle Ogier forment un couple éternel du cinéma. L’un metteur en scène extrême et l’autre actrice hypnotisante fascinent par leur jeu entre improvisation et émotion! Le film sur le théâtre mélange scène et intimité dans un espace et un temps toujours en mouvement, l’immobilité est impossible et suivre le rythme créée des difficultés que le couple tente de surmonter, non sans mal. Liberté et scénario se mêlent dans un carambolage délicat, pas de limite dans la durée des scènes, quitte à permettre de savants délayages et des pétillantes élucubrations. L’intrigue se suit en pointillés dans d’incessantes digressions artistiques et sentimentales. Plus qu’un film, L’amour fou est une véritable expérience comme la Nouvelle Vague aimait à en offrir, sous les auspices d’un réalisateur exigeant à la vision exacerbée de l’être humain. Rien n’est simple, rien ne se fait en ligne droite, tout est virages et détours, atermoiements et péripéties. Le couple Kalfon/Ogier s’aime mais se déchire, le couple se trouve et se dérobe, les plans séquences sont nombreux, mettant à rude épreuve autant les acteurs que les spectateurs pour un résultat assez fascinant. La lenteur de la plupart des scènes tranche avec la violence de certaines autres. L’amour fou est un amour qui met en danger les personnages, c’est excitant, revigorant, mais dur à suivre sur la durée, les sentiments se diluent inévitablement dans tous ces élans répétés. La pièce Andromaque est un catalyseur autant qu’un poison pour les sentiments, un nouvel amour naît pendant les répétitions, filmées par une équipe de télévision, avec un effet de miroir troublant et une mise en abime de l’amour autant que du théâtre. L’œil de la caméra devient intrusif, le metteur en scène s’en amuse, les comédiens beaucoup moins, ils y voient une violation de leur intimité. La beauté diaphane de Bulle Ogier capte l’attention de la caméra et des spectateurs. La scène de séparation, avec la découpe des vêtements, est perturbante, la ressemblance métaphorique avec le déchirement des corps crispe.
Le film a été restauré en 4K sous la supervision de Caroline Champetier pour redécouvrir un film culte de la Nouvelle Vague le 13 septembre au cinéma.
Synopsis: Claire et Sébastien vivent ensemble. Sébastien est metteur en scène de théâtre et Claire comédienne. Elle s’apprête à jouer Hermione dans une mise en scène d’Andromaque de Racine que Sébastien et sa troupe répètent, sous l’œil d’un réalisateur de télévision qui filme leur travail. Lors d’une répétition où elle peine à dire son texte, elle quitte brusquement le théâtre. Sébastien la remplace, au pied levé, par Marta, son ancienne femme. Tandis qu’au théâtre les répétitions avancent, Claire, seule dans son appartement, perd pied peu à peu.