Roman de Stefan Zweig, écrivain étranger le plus lu en France, Le joueur d’échecs est adapté en BD par Thomas Humeau (Desert Park, Printemps Noir) dans un album élégant, digne et profond. L’auteur livre en effet un récit méticuleux et soigné où il met en scène avec brio ces deux joueurs d’échecs totalement étrangers l’un de l’autre, coincés sur le même paquebot. Czentovic est champion du monde d’échecs, arrogant, colérique et séducteur tandis que l’autre, maladivement modeste et réservé, ne dit pas son nom en préférant se faire appeler M. B. Au hasard de mondanités que l’un recherche et l’autre fuit, les deux joueurs vont s’affronter dans un duel à mort qui ravira les riches passagers du vaisseau marin. Prenant la mesure du rythme du roman de Zweig, Humeau met ses deux personnages principaux en perspective. Il nous conte en chassé-croisé leur passé, leur parcours, leur histoire. Et ce qui se passe sur ce paquebot n’en devient que plus fort.
Tout comme le dessin très puissant de l’auteur. Son trait prend, certes, quelques libertés en empruntant des lignes irrégulières et peu précises mais il s’en dégage un tel magnétisme qu’il est difficile de ne pas se laisser surprendre. Avec des couleurs irréelles, où le rouge et le bleu viennent tour à tour draper l’atmosphère, le dessinateur exacerbe avec brio la sensation d’étouffement. Le lecteur est piégé dans ce songe romanesque, entre un cavalier et sa reine, et ne peut s’échapper de cette prison flottante.
Le joueur d’échecs est en résumé une belle adaptation BD, aussi audacieuse que raffinée. A lire.
Sur un paquebot reliant New York à Buenos Aires, deux joueurs d’échecs que tout sépare s’affrontent. Czentovic, orphelin taciturne, arrogant, et tacticien remarquable, devenu champion du monde, et Mr. B, un mystérieux et magnétique aristocrate autrichien rescapé des geôles nazies.
Cette histoire est écrite sur le principe du récit en abyme. Dans le huis clos sur le paquebot viennent s’intercaler deux récits. Le premier nous emmène dans une province russe reculée pour suivre l’ascension fulgurante du prodige Czentovic. Le second nous permet d’en apprendre plus sur le mystérieux Mr.B et l’enfer de son séjour dans la chambre d’hôtel autrichienne.
