Love & Friendship met à l’honneur l’esprit british d’antan
Love & Friendship est la charmante adaptation du roman épistolaire Lady Susan de Jane Austen. Le réalisateur Whit Stillmann retranscrit parfaitement l’esprit pince sans rire et pétrit de contradictions du petit monde aristocratique anglais du XIXe siècle. Les dialogues sont tout empreints d’hypocrisie et de bienséance pour des double sens savoureux et des situations alambiquées. Rien ne doit dépasser et le respect des conventions est la règle. Pour le meilleur et pour le pire.
Kate Beckinsale interprète une Lady Susan manipulatrice à souhait et détestable en diable. Son joli sourire ne l’empêche aucunement de mordre et de déblatérer les pires insanités avec cette inimitable retenue toute british. Récemment veuve, elle doit habilement manoeuvrer pour mettre la main sur un nouveau mari fortuné tout en veillant bien évidemment à son bien-être personnel. Le réalisateur suggère les tourments intérieurs et les atermoiement intimes sous une épaisse couche de savoir vivre et de convenances à suivre absolument. Les nombreux personnages du film semblent avoir envie de tout envoyer valser tout en s’en empêchant à tout prix. La fille de Lady Susan est la seule rebelle du lot, toujours prompte à désobéir, véritable précurseur de la liberté des femmes au XXe siècle.
Loin des élans amoureux des autres adaptations de Jane Austen, comme Orgueil et Préjugés ou Raison et Sentiments, Whit Stilmann préfère se concentrer sur les rapports humains fourbes et cauteleux pour un humour très second degré assez inimitable. Si les dialogues sont apparemment très datés XIXe siècle et archaïques, ils sont pourtant d’une modernité criante. Toute la subtilité réside justement dans la différence entre fond et forme. Lady Susan tire les ficelles de son petit monde, débarquant à l’improviste, faisant fi des récriminations (silencieuses) et des désagréments (muets). Experte en manipulation, elle modèle le scénario du film en exacerbant l’intérêt de la femme dans un monde patriarcal rigide et misogyne. Pour un moment de cinéma léger et truculent. Le marivaudage des jeux de l’amour est ici sans hasard mais pas sans calcul.
Un mot sur la bande son très british, avec l’éternel Purcell et son célèbre opus pour les Funérailles de la reine Mary, martial et glaçant à souhait. Les clavecins et violons accompagnent les pérégrinations entre Londres et les demeures bucoliques, sièges des intrigues, duplicités et duperies. Les fans de costumes d’époque seront comblés tant l’accent est mis sur l’authenticité. Le réalisateur présente les personnages à la manière de tableaux comme dans les séries anglaises d’autrefois. Les caractères sont introduits clairement via leurs attitudes compassées, charmeuses ou maladroites. Et comme le film ne dure qu’1h32, le jeu est direct malgré les retournements de situation. Féministe avant l’heure, Jane Austen est peut être à l’origine des aspirations féministes modernes.
Angleterre, fin du XVIIIe siècle : Lady Susan Vernon est une jeune veuve dont la beauté et le pouvoir de séduction font frémir la haute société. Sa réputation et sa situation financière se dégradant, elle se met en quête de riches époux, pour elle et sa fille adolescente.
Épaulée dans ses intrigues par sa meilleure amie Alicia, une Américaine en exil, Lady Susan Vernon devra déployer des trésors d’ingéniosité et de duplicité pour parvenir à ses fins, en ménageant deux prétendants : le charmant Reginald et Sir James Martin, un aristocrate fortuné mais prodigieusement stupide…
Sortie : le 22 juin 2016
Durée : 1h32
Réalisateur : Whit Stilmann
Avec : Kate Beckinsale, Chloë Sevigny, Tom Bennett
Genre : Romance, COmédie, Drame