Les éditions La Boîte à Bulles laissent le champs libre à Etienne Appert pour une BD aussi fantasmagorique que graphiquement éblouissante. L’auteur imagine un voyage sur une rivière tortueuse pour répondre à la question bête comme chou d’un petit garçon. Pourquoi dessine-t-il? Loin de lui répondre en quelques mots, il lui faut bien 224 pages pour mener à bien la narration d’une histoire apparemment sans queue ni tête, de la Grèce antique jusqu’à la première guerre mondiale, mais vrai reflet de l’imagination sans limite de l’auteur. L’histoire est belle, les dessins rappellent la BD foisonnante Habibi de l’auteur américain Craig Thompson, le voyage est éblouissant.
Un voyage intérieur passionnant
Difficile d’expliquer la contenu de la bande dessinée Rivière d’encre. L’auteur semble dessiner au rythme de la pensée pour refléter au mieux le flux sans fin de sa pensée. Alors que le narrateur et son passager commencent à naviguer sur une rivière sans retour, d’autres caractères apparaissent pour figurer l’apparition du dessin dans l’histoire de l’humanité. Etienne Appert image une femme appelée Saminia décidée à figurer l’ombre de son amant Saurias sur la pierre pour ne jamais l’oublier et pouvoir penser à lui jusqu’à son retour. Et puis il y a aussi un combattant de la Première guerre mondiale, Orphée, des guerriers, tout le monde se mélange au fur et à mesure de pages richement décorées. Rivière d’encre est une vraie BD conceptuelle, loin des standards habituels et placée sous l’égide de la liberté la plus absolue. Le début, le milieu, la fin, tout semble se téléscoper dans un moment de lecture qui fera date.
La BD sort le 8 janvier, et il faut se jeter absolument dessus. Rivière d’encre est un grand moment de lecture qui en appellera d’autres, à n’en pas douter, tant plus lecture semblent nécessaires pour complètement appréhender l’ouvre d’Etienne Appert.
Mot de l’éditeur: « Pourquoi tu dessines ? » demande un jour un enfant à Étienne.
Pour répondre à son questionnement, l’auteur choisit d’emprunter ce qu’il nomme la rivière d’encre : celle qui coule depuis le tout premier trait tracé par un homme et contient chaque histoire personnelle et universelle du dessin.
La légende veut que le premier dessin ait été tracé en Grèce bien avant l’antiquité, par la main d’une femme qui voulu accrocher sur le mur de sa maison l’ombre de son aimé. C’est son histoire que nous suivons, mêlée aux souvenirs de l’auteur et à ceux de l’enfant qui l’accompagne. Et, pour un bout de chemin, François Boucq et Edmond Baudouin leur serviront de guides.
Dessiner, mais pour quoi alors ? Pour laisser quelque chose dans l’au-delà, nous qui sommes mortels ? Pour donner forme à l’innommable ? Pour accrocher l’ombre d’un être aimé sur le mur de sa maison ?
Date de parution: 8 janvier 2020
Auteur: Etienne Appert
Editeur: La Boîte à Bulles
Prix: 224 pages, 28€