La vengeance du pardon, quatre nouvelles redoutables (Albin Michel)
Eric-Emmanuel Schmitt nous révèle avec La vengeance du pardon, cette fois-ci, quatre histoires uniques. Toutes tournées autour des sentiments humains, pas vraiment réjouissants ! Chacune a sa morale…
Scénarios originaux et palpitants
La première histoire, Les sœurs Barbarin (94 pages), est centrée sur la vie de jumelles, Lily et Moïsette, durant quatre-vingts ans ! Ce sont des vraies jumelles, parfaitement identiques. Mais si apparemment ce sont les mêmes, dans leur tête, elles n’ont guère de point commun. Moïsette est jalouse de son ainée, de trente minutes, depuis sa naissance. Il faut dire que Lily est parfaite et toujours prête à pardonner les misères que lui fait subir sa sœur. Jusqu’où ira Moïsette avec sa sœur ? L’analyse psychologique de Moïsette est tellement excellente, qu’on lit cette histoire à toute vitesse en se demandant jusqu’où l’auteur veut nous emmener. A coup sûr sur un terrain très glissant…
La seconde histoire, Mademoiselle Butterfly (97 pages), raconte l’histoire d’un homme très riche, William Golden, directeur d’une célèbre banque. Dès le début de l’histoire, on apprend que cette banque est en très grosse difficulté par la faute de trois employés, dont le fils de William. Ensuite, l’auteur nous parle de William au moment de son adolescence ; Il a 17 ans, il part en vacances en montagne, dans les Alpes, avec son groupe d’amis, les Aigles. Et bêtement, William va dire oui à un pari lancé par ses amis : coucher une fois avec la jeune fille, voisine de leur maison, très jolie mais un peu simplette, Mandine. Cette histoire est celle qui nous aura le plus marqués. Beaucoup de messages y sont envoyés par le biais de cette fameuse rencontre avec Mandine. Une rencontre qui sera déterminante pour William mais qui ne l’apprendra que plusieurs années plus tard… Mandine, la simple d’esprit, donne une très belle leçon d’amour inconditionnel…
Les deux autres histoires sont un peu plus courtes. Tout d’abord, La vengeance du pardon (78 pages) et Dessine-moi un avion (74 pages).
La vengeance du pardon est une bien singulière histoire avec une morale tout aussi surprenante. Elise a perdu son enfant unique, Laure, violée et tuée par Sam Louis. Ce criminel, elle le voit en prison à Paris depuis deux ans. Il vient d’être transféré en Alsace. Du coup, Elise déménage et s’installe près de la nouvelle prison. Au début, on ne comprend pas du tout où veut en venir Elise avec cet homme qui a tué sa fille. Elle-même ne le sait pas vraiment. Il est complètement inhumain, ce n’est pas un homme, il en a juste l’apparence. Ils finissent par s’apprivoiser mutuellement… Relations malsaines, perverses ? Ce n’est qu’à la toute fin de l’histoire, que la clé du mystère est dévoilée…
Quant à la dernière histoire, elle reprend l’histoire du Petit Prince de Saint-Exupéry avec la rencontre d’un vieillard et d’une petite fille qui lui demande de lui dessiner un avion. Pas par hasard mais parce qu’elle sait qu’il est aviateur… Et lui, au fil de l’histoire qu’il lit à la petite Daphné, va se découvrir aussi assassin…
Amour et pardon
Publik’Art n’aime pas trop les romans composés de nouvelles ; chaque nouvelle pourrait faire l’objet d’un livre ! Surtout les deux premières nouvelles, absolument captivantes. Elles tournent toutes autour du pardon, mais de façon tellement différente ! Certaines font peur, d’autres non. Eric-Emmanuel Schmitt met l’accent à travers ces nouvelles, des sentiments humains très forts, comme l’amour mais aussi et surtout la haine. L’homme est-il naturellement bon ou plutôt mauvais ? La nature humaine n’est pas forcément celle que l’on croit. L’important est de l’accepter, de la comprendre et ensuite de pardonner… Toujours avec amour… Pardonner à l’autre ou se pardonner. L’écriture de Eric-Emmanuel Schmitt est toujours brillante, avec un vocabulaire pointilleux et laisse planer un suspens à travers chacune de ses phrases… Ce livre, La vengeance du pardon, se lit avec beaucoup de plaisir et à toute vitesse avec toute l’ambiguïté du pardon et toute la beauté de l’amour. Mais c’est un livre à garder : à lire et à relire pour en puiser tous les messages.
Quelques extraits :
– Si je l’aime, je lui pardonne.
– Si tu lui pardonnes, tu ne t’aimes pas, tu ne te respectes pas.
– – Mais c’est bien ça, aimer. Vouloir que l’autre soit heureux. Faire passer l’autre avant soi. P.82
En amour, le mérite réside dans celui qui aime, pas dans celui qui est aimé.
P. 200
Comment retrouver notre part d’humanité quand la vie nous a entraîné dans l’envie, la perversion, l’indifférence et le crime ?
Date de parution : le 1er septembre 2017
Auteur : Eric-Emmanuel Schmitt
Editeur : Albin Michel
Prix : 21,50 € (336 pages)
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