Festival d’Avignon du 4 au 25 juillet 2015
La 69e édition du Festival d’Avignon avec à sa tête Olivier Py dont c’est la deuxième année en tant que directeur, débute ce samedi 4 juillet jusqu’au 25 à l’abri d’une programmation riche et variée, avec pour fil conducteur le thème de l’altérité, « je suis l’autre ».
Parce ce que le théâtre est à la fois le miroir de nos vies et du monde, puisse qu’il soit aussi cette main enchanteresse et gardienne tendue à l’autre, pour l’autre et avec l’autre
Lieu d’ouverture et de confrontation donc où se retrouvent des artistes aux inspirations et esthétiques contrastées, d’origines, de culture et de générations différentes, et pour une autre vision du théâtre. A la fois d’avant garde et de référence, le Festival compte pas moins de 47 spectacles dont 25 créations présentés dans une vingtaine de lieux allant de petites chapelles à l’emblématique Cour d’honneur du Palais des Papes et ses 2000 places passant par La FabricA, nouveau lieu permanent du festival.
C’est Olivier Py qui ouvre cette année les festivités dans la Cour d’honneur avec « Le Roi Lear » de Shakespeare du 4 au 13 juillet et cette pièce monstre qu’il qualifie de « pièce absolue ». Il l’a retraduite en vers libres pour avoir « un texte au galop » et fait appel à son acteur fétiche, Philippe Girard, dont le lyrisme et le sens de la tragédie collent selon Py à ce rôle mythique.
Le chorégraphe Angelin Preljocaj lui succédera du 17 au 25 juillet, avec « Retour à Berratham », à partir d’un texte puissant de l’écrivain Laurent Mauvignier sur le retour au pays d’un jeune homme après la guerre. Sur scène, Preljocaj propose à quatorze interprètes, danseurs et comédiens, d’être les observateurs et les témoins des répercussions de la guerre sur les consciences.
La venue aussi et toujours très attendue de la référence contemporaine du théâtre allemand Thomas Ostermeier s’annonce comme un moment majeur, qui installe à l’Opéra théâtre son décor inspiré du « Globe » de Shakespeare pour « Richard III ». Le directeur de la Schaubühne de Berlin prend ses quartiers du 6 au 18 juillet avec dans le rôle titre son acteur phare et vertigineux, Lars Eidinger.
Ostermeier était dernièrement de passage au Théâtre de la Ville pour la reprise de la pièce « Le Mariage de Maria Braun » de Fassbinder dont il s’est mesuré avec brio à la complexité de son écriture.
La République de Platon, réécrite et adaptée par Alain BADIOU pour les 22 jours du Festival, sera lue à haute voix, chaque jour, à heure fixe, par tous et pour tous. Et sera l’occasion d’une mixité dans un projet commun au long cours où tous lecteurs seront cette République, notre République citoyenne.
Autre spectacle prometteur, celui de Philippe Berling du 21 au 25 juillet au Théâtre Benoît-XII qui adapte sur scène sous le titre Meursaults au pluriel, le roman de Kamel Daoud, « Meursault, contre-enquête » et qui donne identité, visage et personnalité à cet Algérien anonyme tombé sous les balles du héros de Camus dans l’Etranger.
Le grand metteur en scène polonais Krystian Lupa, présent pour la première fois à Avignon (du 4 au 8 juillet) dont les spectacles sont marqués par une esthétique théâtrale et un dépassement de l’acteur qui font date, s’empare pour une épopée de 4H20 de l’univers ravageur de l’écrivain Thomas Bernhardt avec « Des arbres à abattre » qui voit l’auteur se jouer des milieux culturels autrichiens
D’improvisations en extrapolations, Kirill Serebrennikov et ses acteurs du Gogol Center livrent dans la cour du lycée Saint-Joseph du 6 au 11 juillet une version russe et actualisée du film « Les Idiots » de Lars von Trier, dont ils conservent l’économie de moyens et l’esthétique dépouillée.
En complément des spectacles, le Festival se veut aussi un lieu de débats et d’échange des idées sous différentes formes : Territoires cinématographiques, cycle de musiques sacrées, Ateliers de la pensée, installations et expositions, conférences, lectures, émissions radiophoniques.
Enfin, signalons qu’une exposition est dédiée à Patrice Chéreau, homme de théâtre, d’opéra et de cinéma, décédé en octobre 2013 (à partir du 10 juillet de 11h-19h Collection Lambert). Elle propose un parcours inédit associant les archives de Patrice Chéreau (conservées à l’IMEC), ses notes, esquisses, des entretiens filmés et des œuvres d’art de toutes périodes avec une prédilection pour les grands maîtres du romantisme passionnés d’Histoire, tels Delacroix, Géricault, Ingres, Chassériau ou des maîtres du XXème siècle, de Giacometti à Anselm Kiefer pour évoquer Richard Wagner, de Francis Bacon à Cy Twombly qui comme Chéreau sut trouver l’essence de la tragédie grecque.
Parce ce que le théâtre est à la fois le miroir de nos vies et du monde, puisse qu’il soit aussi cette main enchanteresse et gardienne tendue à l’autre, pour l’autre et avec l’autre…