Une adaptation choc du chef d’oeuvre 1984 au Théâtre de Ménilmontant
Le célébrissime ouvrage de George Orwell 1984 est porté sur la grande scène du Théâtre Ménilmontant et la puissance du texte est parfaitement restituée. Cette tragédie d’anticipation résonne d’une terrifiante actualité dans sa peinture d’une société totalitaire liberticide et omnisciente. Les acteurs sont au diapason d’une mise en scène à la violence choc, éprouvante et sans concession pour un spectacle total.
Les spectateurs sont accueillis par 4 acteurs silencieux, prostrés et immobiles sur le devant de la scène. Affublés de masques à oxygène et de tenues paramilitaires, ils observent silencieusement l’assistance en train de prendre place. Des films en noir et blanc datant de la seconde guerre mondiale sont projetés à l’arrière plan sur un grand mur blanc. L’ambiance est délibérément anxiogène, l’univers de 1984 sera sombre et pesant.
Un ouvrage culte finement adapté
Aux côtés de Brave New World ou de Chroniques martiennes, 1984 fait partie des incontournable de la science fiction. Avec la particularité d’une fine analyse psychologique des individus embrigadés dans une idéologie dominante et totalitaire. Le metteur en scène Sébastien Jeannerot a découvert la mise en scène d’Alain Lyddiard à Londres en 2001 et le coup de coeur a été immédiat. Reprenant les éléments essentiels du roman de George Orwell, le metteur en scène britannique a volontiers cédé les droits d’une pièce que Sébastien Jeannerot a brillamment adapté pour le public français. 9 années après la première mise en scène de la pièce, elle reprise au Théâtre de Ménilmontant pour un résultat toujours aussi puissant.
Une mise en scène ultra dynamique
L’atmosphère lugubre de l’ouvrage demandait un art consommé de la mise en scène pour capter sans relâche l’attention des spectateurs. Et la pièce est rien de moins qu’un modèle du genre. Tandis que des vidéos sont projetées sur les murs pour approfondir le propos, d’immenses échafaudages sont meus pour modifier la physionomie de la scène. Les habitués du Théâtre de l’Odéon ne seront pas dépaysés tandis que les heureux spectateurs des récents spectacles The Wall de Roger Waters feront le rapprochement avec les messages impérieux projetés sur LE mur qui se construit petit à petit entre le groupe et le public pendant le concert. Décor en mouvement, usage ultra pertinent de la vidéo, impossible de sortir de ce 1984 tant les sens sont sollicités en permanence.
Des acteurs habités
La troupe évolue en petit comité. Aux côtés de l’intense Sébastien Jeannerot dans le rôle de Winston Smith, Helena Foin-Coffe interprète une Julia à à la dramaturgie admirable et Bernard Senders fait un O’Brien crissant en diable. Des acteurs interprètent les soldats/ouvriers/protagonistes tout en mouvant les décors régulièrement en braves manoeuvres dévoués à la dictature en place. Le discours de l’ouvrage est repris à la lettre avec certes quelques élisions mais qui servent idéalement le rythme de la pièce et le principal demeure. L’esprit du livre est respecté et les élèves présents dans la salle ont semblé fasciné par le déroulement de la pièce, émettant certes quelques rires épars mais écoutant religieusement cette mise en garde contre la mise en place d’un état totalitaire.
Ce 1984 semble d’une actualité troublante tant la promotion de la surveillance d’autrui et de la haine généralisée font écho avec l’actualité. Les presque 2h de la pièce tiennent en haleine pour un impact prodigieux sur le public. Un intense moment de théâtre.
Dates : du 20 septembre au 22 décembre 2016
Lieu : Théâtre de Ménilmontant (Paris)
Metteur en scène : Sébastien Jeannerot
Avec : Sébastien Jeannerot, Hélène Foin- Coffe, Bernard Senders
Pourquoi jouer Winston comme un alcoolique ? Cela gâche toute la pièce, c’est dommage 🙁 il apparaît comme abruti d’alcool, alors que dans le livre il n’est pas du tout ça.