Hôtel Feydeau : la pastille réussie et surréaliste de Georges Lavaudant
Georges Lavaudant est à l’affiche de l’Odéon Théâtre de l’Europe après l’avoir dirigé de 1996 à 2007, avec un condensé de cinq pièce de Feydeau, toutes écrites en un acte et à la fin de sa carrière.
A partir d’un découpage enlevé et dynamique qui permet de passer d’une pièce (fragmentée à l’essentiel) à l’autre puis d’y revenir, sur un ton aussi acidulé que décalé, Lavaudant cristallise à l’envi la période de crise et son emballement où chacun des couples exposé s’affronte dans une surenchère de mauvaise foi et de répliques assassines.
Des couples donc et à chaque fois l’apocalypse : un mari qui rentre un peu trop tard d’un bal costumé en Louis XIV, un valet un peu abruti qui frappe à la mauvaise porte pour annoncer la mort subite de la belle-mère ou encore une impossible purgation de bébé en passant par une femme qui veut absolument que son mari porte sur la tête un pot de chambre qui n’a jamais servi !.
Un guerre des sexes
Et pour les incarner huit personnages sur scène : quatre hommes (Gilles Arbona, Benoît Hamon, Manuel Le Lièvre et André Marcon) et quatre femmes (Astrid Bas, Lou Chauvain, Grace Seri et Tatiana Spivakova), qui sont les couples que l’on rencontre dans Feu la mère de madame, On purge bébé !, Léonie est en avance et Mais n’te promène donc pas toute nue !.
La traversée débute par un prologue où John, le valet de chambres s’insurge contre sa maîtresse, voulant altérer d’un crachat tous les potages des bourgeois de Paris et offre aussi un épilogue, le prologue étant tiré de Cent millions qui tombent, une pièce de Feydeau restée inachevée.
La langue, tranchante, mène le bal dans une danse infernale propice aux saillies à double sens, jeux de mots, et joutes verbales qui mettent à mal le couple réduit en l’absence de tout désir, à une provocation dominatrice et un constat d’impuissance.
Une folie surréaliste
Et dans cette fuite en avant aussi drôle que féroce, André Marcon, Gilles Arbona et Manuel Le Lièvre sont formidables de cocasserie.
Entre les pièces et leur télescopage, un intermède musical jazzy fait naître une chorégraphie avec les comédiens dans le pur esprit de « Palace » et sa folie surréaliste à l’instar du décor très réussi de Jean-Pierre Vergier avec son hall d’hôtel immaculé seulement meublé de huit chaises colorées, laissant de chaque coté apparaître deux portes prêtes à claquer.
Dates : le 9 février 2018 l Lieu : Théâtre Montansier (Versailles)
Metteur en scène : Georges Lavaudant