Mademoiselle confirme la baisse de régime de son réalisateur
Park Chan-Wook revient avec un thriller à la fois suranné et étonnement moderne. Le réalisateur sud-coréen semble abandonner pour de bon la recette qui a fait son succès à base de violence crue et d’intrigues policières pour se tourner vers le film d’époque et le jeu pervers entre trois personnages à la duplicité chevillée au corps. Le triangle amoureux est retors et les apparences sont autant trompeuses que les péripéties peuvent lasser à force de coups de théâtres successifs. Le film devient trop vite un exercice de style avant tout esthétique.
Une servante coréenne, sa maitresse japonaise et l’amant de cette dernière complotent, s’aiment et se déchirent.
La nostalgie de la trilogie magique
Entre 2002 et 2005, Park Chan Wook marchait sur l’eau et sortait trois films aussi fascinants que violents et cruels. Sympathy for Mister Vengeance, Old Boy et Lady Vengeance créaient un tsunami international parmi les cinéphiles. Un grand réalisateur naissait avec une esthétique détonnante et une règle implacable: plonger ses héros dans des situations dantesques dont ils souhaitent se sortir à tout prix. Beaucoup regrettent la tiédeur du jury de Cannes et la non obtention de la palme en 2003 pour Old Boy. Mais la grâce n’est pas éternelle et Park Chan Wook est depuis rentré dans le rang, privilégiant des héroïnes plus tourmentées et moins implacables.
L’éternel triangle amoureux
Ce n’est plus une mais deux héroïnes qui se déchirent (au moins en apparence) dans une intrigue à tiroirs. Le film enchaine trois épisodes qui évoquent la même histoire sous des points de vue différents. Le procédé est classique et fait souvent ses preuves. Le spectateur est brinquebalé à son corps défendant et l’éternelle dialectique maitrise/servitude est illustrée dans une atmosphère de plus en plus perverse. Si la servante est d’abord décrite comme une petite chose sans défense et le séducteur comme un manipulateur de génie, les cartes s’inversent vite… La relation entre la servante et sa maitresse devient le vrai pilier du film. Le film rappelle parfois La vie d’Adèle hélas dans ses moments les plus inutiles. C’est peut être la mode d’étaler des ébats féminins aguichants en mode voyeuriste sans que cela soit vraiment utile.
Très attendu, ce Mademoiselle peut laisser sceptique par son manque d’ambition. Park Chan Wook semble ourler autour du pot sans oser réitérer sa folie d’antan. C’est bien dommage.
Corée. Années 30, pendant la colonisation japonaise. Une jeune femme (Sookee) est engagée comme servante d’une riche japonaise (Hideko), vivant recluse dans un immense manoir sous la coupe d’un oncle tyrannique. Mais Sookee a un secret. Avec l’aide d’un escroc se faisant passer pour un comte japonais, ils ont d’autres plans pour Hideko…
Sortie : le 1er novembre 2016
Durée : 2h25
Réalisateur : Park Chan-Wook
Avec : Kim Min-Hee, Kim Tae-Ri, Jung-Woo Ha
Genre : Drame, Thriller, Romance