Myriam Boyer et Jean Benguigui dans un face à face intense pour « Le Chat » de Simenon
En 1967, paraît ce roman, Le chat, signé du prolifique écrivain qu’était Georges Simenon et dont l’adaptation au cinéma par Pierre Granier-Deferre vaudra à Jean Gabin et Simone Signoret, d’incarner un couple maléfique, gangréné par l’usure, pour un duo aussi glacial que cruel.
Adapté pour la première fois au théâtre, Myriam Boyer et Jean Benguigui reviennent à la version initiale du livre où la guerre qu’ils se livrent se nourrit de leur différence sociale, du poids des souvenirs et de leurs idéaux inconciliables. Un affrontement aussi noir que jubilatoire.
Le Chat, c’est donc l’histoire de deux veufs que tout oppose et qui unissent leurs solitudes sur un malentendu, entre désespérance et intérêt.
Emile est un ouvrier à la retraite, rustique et dépourvu d’éducation tandis que Marguerite appartient à la bourgeoisie cul-béni provinciale mais déclassée, suite à la perte de la biscuiterie familiale.
Ils ont du mal à vivre seuls plus qu’ils n’ont d’élans passionnés, de projets communs et d’affinités électives. Leur mariage célébré va rapidement tourner court et laisser place à l’indifférence et aux ressentiments. Chacun devenant le bourreau et la victime de l’autre.
Un affrontement aussi noir que jubilatoire
La mise en scène rythmée de Didier Long explore avec finesse la psychologie des personnages avec ses attentes, ses failles et ses contradictions.
Où par un procédé de flash-back se déroule leur rencontre pleine d’espoir, la désillusion de la vie commune et le point de rupture qui cristallise le temps présent avec les hostilités déclarées lorsque le chat de l’un et le perroquet de l’autre, deviennent les victimes collatérales de leur affrontement implacable.
Une guerre silencieuse, sournoise et froide où la parole a laissé la place à des échanges délétères sous forme de petits bouts de papiers laconiques interposés et à une délimitation cloisonnée de l’espace commun.
Jean Benguini et Myriam Boyer sont criants de vérité, au plus près de cette condition humaine confrontée à ces manques et à cette incompréhension destructible face à l’autre.
La fuite en avant se décalque aussi sur la fin d’un monde où les promoteurs sont à l’oeuvre pour construire de nouveaux immeubles et faire table rase du quartier populaire de Marguerite qui en refusant de vendre sa maison et par la même se résoudre à son déracinement, s’expose chaque jour à la menace d’un chantier de plus en plus envahissant et opressant.
Un spectacle accompli porté par une adaptation inventive.
Dates : A partir 6 septembre 2016 l Lieu : Au Théâtre de l’Atelier (Paris)
Metteur en scène : Didier Long l Avec : Myriam Boyer et Jean Benguigui