2 semaines de représentations exceptionnelles de La Cantatrice Chauve à l’Athénée Théâtre Louis Jouvet
Une des pièces les plus jouées en France depuis 70 ans revient pour 2 semaines de représentations exceptionnelles à l’Athénée Théâtre Louis Jouvet. Les personnage volontairement ridicules et caricaturaux de la cantatrice chauve discourent avec toujours autant de superficialité et si peu de liant dans la mise en scène colorée de Jean-Luc Lagarce. La même troupe reprend les mêmes rôles que dans la version de 2006 déjà jouée au Théâtre de l’Athénée. Les adeptes de Ionesco se délecteront de ce théâtre de l’absurde basé sur une accumulation de non-sens et de dialogues délibérément vides parce que… il faut bien parler, voyez vous, quitte à ne rien dire!
Une pièce fondatrice
L’histoire de la création de la pièce La Cantatrice chauve par Eugène Ionesco en 1950 est truculente en diable. S’amusant des phrases sans signification s’accumulant dans la méthode Assimil anglais/français alors qu’il essaye d’apprendre la langue de Shakespeare, il extrapole un texte fondé sur des phrases sobres et étranges uniquement destinées à faire la conversation. La pièce initialement intitulée L’anglais sans peine trouve son nom définitif quand un comédien victime d’un trou de mémoire remplace la phrase L’institutrice blonde par La Cantatrice Chauve décidant alors son auteur de la renommer ainsi. L’absurde s’insinue dans des dialogues issus du manuel d’apprentissage et sciemment gonflés à l’excès pour les rendre aussi abscons que maniérés. Deux couples anglais issus d’une bourgeoisie engoncée dans des principes pompeux se rencontrent sans vraiment le vouloir et se font la conversation à coups de dialogues de plus en plus vides. Les spectateurs s’extasient d’une telle science du non-sens qui avait exaspéré au plus haut point la critique en son temps avant que la pièce ne devienne finalement un classique.
Une mise en scène rose bonbon
Jean-Luc Lagarce a voulu renouveler l’intérieur bourgeois initial du décor en le transposant dans un jardin anglais propret. Les couleurs vives renvoient à un certain esprit anglais désuet déjà évoqué dans les chansons des Kinks à la fin des années 60 qui déjà invoquaient un esprit anglais en cours de disparition. Si une inquiétude pointe par instants, c’est surtout de voir cette douce félicité intangible s’évanouir dans la marche inexorable du temps. Les personnages d’abord stricts dans leurs costumes so english rappelant la Reine d’Angleterre et son invisible mari s’agitent de plus en plus jusqu’à devenir des marionnettes à qui on aurait coupé les fils. Une narration volontairement brinquebalante aboutit à des personnages s’inventant eux-mêmes une histoire, invitant des spectateurs sur scène pour mieux intervertir les rôles. L’esprit de Ionesco est invoqué à tout bout de champs avec par exemple des rappels comiques de la mise en scène de Nicolas Bataille qui tombent comme des gros cheveux sur une soupe pataphysique.
L’heure et demi de spectacle se clôture en fanfare avec le sentiment que le théâtre de l’absurde a encore de beaux jours devant lui. Les comédiens donnent une tonalité proche des Monty Pythons voire d’Absolutely Fabulous qui ravira les inconditionnels d’humour anglais.
Dates : du 17 janvier au 3 février 2018
Lieu : Théâtre de l’Athénée (Paris)
Metteur en scène : Jean-Luc Lagarce
Avec : Mireille Herbstmeyer, Jean-Louis Grinfeld, Marie-Paule Sirvent, Emmanuelle Brunschwig, Olivier Achard, Christophe Garcia, François Berreur