Adapté de l’œuvre de Gilles Farcet et préfacé par Alejandro Jodorowsky, la BD d’Etienne Appert revient sur un personnage clé de la contre culture américaine, Allen Ginsberg, emblème de la Beat Generation. Gilles Farcet raconte sa jeunesse frustrée par la vision rigide de la réalité proclamée par l’école et ses professeurs formatés avant la rencontre avec l’esprit libertaire d’un courant de pensée révolutionnaire. Etienne Appert suit les différentes rencontres avec les plus grands esprits de ce temps revendicatif à la si grande empreinte dans les générations suivantes avec des dessins aussi forts en symbole que chargés de sens.
Une BD céleste
Les pages sont ornées de dessins aux évocations puissantes, anges et démons se bousculent au fur et à mesure des éructations poétiques des personnages. Le jeune journaliste français assiste à des monologues enflammés. Ecolo avant l’heure, anti guerre, anti nucléaire, Ginsberg gravite dans un monde où beaucoup souhaitent se réchauffer à sa flamme, quitte à épuiser l’énergie inépuisable du grand démiurge transgénérationnel. Vif et ouvert, le poète réagit à tout et saute de sujets en sujets sans jamais se lasser. Le poète invoque le sacré trop absent de la vie moderne, la candeur nécessaire pour garder les indispensables innocence et honnêteté. L’esprit beat traverse la BD, avec les rues de New York, les invocations des charnières historiques de l’esprit Beat, la lutte permanente pour la liberté d’expression. D’autres personnages traversent le livre, comme le mystérieux Hank aka Henry Warshawsky, gros ours bourru qui vit une véritable existence de clochard céleste. Les pages se lisent avec l’esprit embrumé, comme en pleine hallucination psychédélique, tant de citations qu’il en est presque impossible de toutes les retenir. Ma préférée: On ne confie pas aux matons les secrets de l’évasion. Pas de linéarité dans la lecture, les pages accumulent les anecdotes et les esclandres, les mantras et les références dans un grand foisonnement constant.
La connexion à la grande pulsation du Beat est une vraie prouesse dans cette BD quasi anthropologique sur une typologie d’humains débarrassés de la patine de la société pour rester errer en liberté. Gardien de l’héritage beat, Allen Ginsberg se donne à être découvert comme un être à part, unique.
Synopsis: Au cours des années 1950, une nouvelle génération d’auteurs et d’artistes ébranle l’Amérique avec son style percutant et contestataire. Ils prennent le nom de Beat Generation, nom signifiant à la fois « génération battue », « génération de la pulsation» et « génération en quête de béatitude ». Parmi eux Jack Kerouac, William S. Bourrough, Neal Cassady…
En 1988, le journaliste français Gilles Farcet se rend à New York auprès d´Allen Ginsberg – l’un des plus célèbres poètes américains du 20e siècle, conscience morale de l’Amérique et pilier central du mouvement – pour observer, après trois décennies de culture Beat, vers quelle maturité « la route » chère à Kerouac a conduit ses auteurs.
Ce qui n’était pas prévu, c’est qu’un véritable « clochard céleste » déboule au cours de ses entretiens : poète sauvage, incarnation pure de l’esprit Beat, génie marginal dont les paroles, fusant par giclées épaisses, expriment sans filtre le souffle de la grande pulsation, et entraînent Gilles dans un voyage intérieur « sur la route » de l’initiation psychédélique.
Sur la base des témoignages de Gilles Farcet, Étienne Appert nous (re)plonge dans l’histoire et l’héritage de ce mouvement qui a nourri la plupart des contre-cultures du XXe siècle (beatniks, hippies, punk, écologistes…) et changé la face de l´Amérique.
Editeur: La Boite à Bulles
Auteur: Etienne Appert
Nombre de pages / Prix: 240 pages / 29 euros