« Balanchine, Teshigawara, Bausch » un trio dansant et éclaireur au Palais Garnier
Fils de compositeur, George Balanchine (1904-1983) a appris la musique avant la danse. Toute sa vie, il a gardé cet intérêt et cette intime connaissance de la musique qui, seule, a guidé ses créations. Il disait lui-même : « Le ballet est avant tout une affaire de tempo et d’espace : l’espace délimité par la scène, le temps fourni par la musique ».
Musicalité des corps
C’est donc cette musicalité des corps qui est encore à l’oeuvre avec Agon pour débuter le programme de la soirée où son écriture affranchie de toute narration, tend à l’épure et à cette géométrie de l’espace, entièrement dédiée à la musique et au mouvement.
Une pièce impulsive pour 4 hommes puis 8 femmes à la limite du déséquilibre et qui ouvre à cette empreinte néoclassique, initiée par le chorégraphe. Et dont la maîtrise d’exécution par les danseurs n’est pas démentie.
Ils bougent en alternance et se substituent les uns aux autres comme s’ils étaient interchangeables. Devenus hybrides, bras et jambes se meuvent en des figures géométriques qui accentuent la dynamique de l’ensemble.
Sur la partition composite d’Igor Stravinsky, les enchainements graphiques se révèlent pointus et plastiques. Une réussite.
Espace sensoriel et originel
S’en suit la création de la soirée, Grand miroir, de Saburo Teshigawara qui invente une grammaire organique et animale sur le troublant Violin Concerto d’Esa-Pekka Salonen.
Réglant comme à son habitude la chorégraphie, mais aussi la scénographie, les costumes et les lumières, il tente de percer le mystère de cette partition qui, vibrant sur tous les registres émotionnels, est le résumé kaléidoscopique d’une vie d’artiste.
A l’abri d’un mouvement compulsif et évolutif, puisé dans un souffle intérieur ou interactif entre les danseurs, le plateau carrément investi, se fait espace sensoriel et originel.
Champ de bataille
Enfin, Le Sacre du printemps, morceau d’anthologie de Pina Bausch (1975), vient clore ce programme. Sa reprise est toujours un évènement où sur la scène couverte de terre fraîche, danseurs et danseuses s’opposent en d’âpres combats et s’épuisent jusqu’au sacrifice.
Rituel d’une communauté humaine qui sacrifie l’un des siens, une jeune femme, pour glorifier la divinité du Printemps et dont la symbolique nous renvoie à notre origine et à notre fin.
A l’abri d’une chorégraphie radicale et d’une intensité inouïe, “Le Sacre” se charge de cette danse tellurique qui nous laisse, une fois encore, sans voix.
Dates : du 25 octobre au 16 novembre 2017 l Lieu : Palais Garnier (Paris)
Chorégraphes : George Balanchine / Saburo Teshigawara / Pina Bausch