Maurice Ravel reste un compositeur majeur grâce à la notoriété qu’il a pu revêtir avec son fameux Boléro. Cet air d’inspiration espagnole a été commandé par Ida Rubinstein en 1927 et créé en 1928. D’une durée de plus de 15 minutes, il utilise 2 thèmes en une ritournelle inlassablement répétée, il enivre et subjugue. Le film retrace l’existence d’un homme mal connu, il est certes devenu un des plus grands compositeurs français, représentatif d’une époque où son acolyte Debussy connaissait la gloire, mais peu connaissent les détails de son existence. Le rythme du film est volontairement lent et sa densité permet d’en savoir plus pour connaitre un univers profondément personnel, comme hors du temps, rempli de fantaisie et de fantasmagorie.
Un compositeur unique
Pour incarner Maurice Ravel, l’acteur Raphael Personnaz a donné de sa personne, perdant 10 kilos pour le rôle avec une ressemblance finale frappante. L’acteur est lui-même pianiste à la base, plutôt bon selon ses dires, ce qui lui permet d’interpréter lui-même les œuvres pour piano de Ravel à l’écran pour 80%, le reste étant l’œuvre d’Alexandre Tharaud pour les parties les plus techniques. Maurice Ravel est connu pour avoir été un homme discret, très réservé et particulièrement effacé. Grand fumeur, il était aussi insomniaque, bon pianiste mais pas tout à fait virtuose. Victime d’un grave accident de taxi en 1932, il perdit peu à peu la santé et l’esprit avec une maladie cérébrale dégénérative qui lui causa des troubles de l’écriture, de la motricité et du langage. Ses œuvres les plus connues accompagnent le film, la Valse, la Pavane pour une infante défunte, la Pavane de la Belle au bois dormant, le concerto en sol majeur, le Concerto pour la main gauche et évidemment ce Boléro dont la composition est montrée avec talent pour une réception publique enthousiaste qui ne s’est jamais démentie depuis. La véritable maison de Ravel a servi de cadre à de nombreuses scènes du film, ce Belvédère à Montfort-l’Amaury dans les Yvelines qui reste attaché à sa personne. La réalisatrice Anne Fontaine a pu y tourner après avoir reçu une autorisation expresse, elle a également tourné des scènes dans des cafés parisiens pour montrer les réunions du compositeur avec ses amis. La vie personnelle du compositeur fut très particulière, Ravel ne se maria jamais et ne connut aucune relation sentimentale, ni féminine ni masculine. La solitude fut la force et la faiblesse de Ravel, il ne côtoya que sa mère (Anne Alvaro), sa grande amie (grand amour déçu?) Misia Godebaska (Dora Tillier), sa fidèle amie Marguerite Long (Emmanuelle Devos), sa servante dévouée Madame Rouveleau (Sophie Guillemin) et son amie danseuse Ida Rubinstein (fantasque Jeanne Balibar). S’il aimait s’entourer de femmes, il eut aussi des amis masculins, tel Cipa Godebski (Vincent Perez) et les amis du cercle des Apaches, aka ceux du cercle français d’amis amateurs d’arts, musiciens ou mélomanes. Le film multiplie les flashbacks pour souligner la relation très intense et fusionnelle avec sa mère et rappeler son expérience au sein des troupes françaises du service sanitaire lors de la première guerre mondiale. Les grandes lignes de la vie de Ravel sont décortiquées pour faire ressortir une atmosphère très onirique, comme hors du temps et de l’espace. Alexandre Tharaud prend les traits du critique Lalo pour des joutes verbales piquantes vu que Ravel et lui ne se supportaient que peu.
Boléro est un film biographique qui rend un bel hommage au compositeur, avec une bonne dose de charme et de voltige. Anne Fontaine fait ressembler son film à Ravel lui-même, sans trop d’effusions ni d’artifices, préférant la profondeur et l’authenticité. Le film sort en DVD le 10 juillet et en VOD le 4 juillet pour un moment de musique savoureux.
Synopsis: En 1928, alors que Paris vit au rythme des années folles, la danseuse Ida Rubinstein commande à Maurice Ravel la musique de son prochain ballet. Tétanisé et en panne d’inspiration, le compositeur feuillette les pages de sa vie – les échecs de ses débuts, la fracture de la Grande Guerre, l’amour impossible qu’il éprouve pour sa muse Misia Sert… Ravel va alors plonger au plus profond de lui-même pour créer son œuvre universelle, le Boléro.