2 ans après avoir proposé le déjà magnifique ouvrage Christopher Nolan, la possibilité d’un monde, l’auteur Timothée Gerardin s’attaque à un sujet a priori plus érudit en envisageant la représentation des miracles au cinéma, intégrant dans sa réflexion des notions autant profanes que religieuses. Cinémiracles, l’émerveillement religieux à l’écran démonte aussi bien l’importance de l’élément de surprise chez le spectateur que le vecteur croyance, par delà les considérations ésotériques ou personnelles. Un peu plus dense que d’habitude avec ses 156 pages, l’ouvrage se lit comme un traité fouillé et hautement documenté. Une prouesse de plus pour les éditions Playlist Society.
Un ouvrage profond au delà du cinéma
Les références classiques depuis les origines du christianisme côtoient les réflexions érudites sur ce que le miracle a d’évocateur pour chacun d’entre nous, par delà les croyances religieuses intimes et échappant à toute velléité de catéchisme. Car le miracle au cinéma n’est pas lié qu’à l’apparition inexpliquée, à la guérison inexplicable ou à l’évènement prodigieux, il peut aussi avoir trait au merveilleux, au sublime et même à la supercherie. Le cinéma étant lui-même un medium reflétant le réel mais éminemment trompeur par nature, il peut le travestir et le parer de toutes les illusions. Si les films invoqués ont souvent un rapport à la pensée religieuse chrétienne, autant à travers la figure de Jésus, des saints ou même du diable, c’est parce que le cinéma est historiquement une invention surtout occidentale, parcourant des sociétés imprégnées de protestantisme ou de catholicisme. La dernière tentation du Christ côtoie Conjuring et Rosemary’s baby dans un essai hautement documenté qui interroge sans jamais tomber dans le prosélytisme et fait surtout appel à la curiosité du lecteur. L’auteur le rappelle à travers toutes ses références, il est avant tout critique de cinéma et son but est avant tout de faire réfléchir au sujet d’une image hautement transversale et répandue dans l’histoire du cinéma, celle du miracle, son sérieux naturel l’enjoint à ne pas faire le travail à moitié, d’où cette impressionnante recherche documentaire que l’on imagine dantesque. Le résultat se lit avec avidité, il y a de quoi muscler votre culture générale!
Cinémiracles, l’émerveillement religieux au cinéma propose une vraie réflexion cinématographique sur un thème propre à titiller tous les curieux du cinéma. Les explications proposées ne recherchent pas la facilité et invoquent cet attrait éternel de l’humain pour le merveilleux, si exacerbé qu’il peut l’être via le medium du cinéma.
Synopsis: Dès la naissance du cinéma et le court-métrage Le Christ marchant sur les flots de Georges Méliès (1899), les cinéastes se sont emparés des sujets religieux, et plus spécifiquement de la question des miracles. Dans de grandes fresques hollywoodiennes, telles que Les Dix Commandements (Cecil B. DeMille, 1956) ou Ben-Hur (William Wyler, 1959), le miracle constitue l’apothéose qui associe la sidération des spectateurs à un émerveillement religieux. D’Ordet (Carl Theodor Dreyer, 1955) à L’Apparition (Xavier Giannoli, 2018) en passant par Bruce tout-puissant (Tom Shadyac, 2003), le phénomène miraculeux a connu une multiplicité d’évocations, au cinéma et dans les séries. C’est à chaque fois une expérience-limite qui fait s’opposer l’invisible et le visible, la folie et la raison, le bien et le mal. Par la mise en scène, le miracle peut être sublimé, dénoncé comme supercherie, ou au contraire trouver une dimension nouvelle. Cinémiracles, l’émerveillement religieux à l’écran explore les modes de représentation du miracle, au croisement des questions esthétiques et spirituelles
Editeur: Playlist Society
Auteur: Timothée Girardin
Nombre de pages / prix: 168 pages / 14 euros