Le Horla fait tressaillir au Théâtre Michel
Un homme est peu à peu submergé par la folie alors qu’il croit être tombé sous la coupe d’une créature invisible dénommée le Horla. La nouvelle de Maupassant publiée en 1886 est adaptée sur la scène du Théâtre Michel pour un seul en scène exaltant. Le comédien Florent Aumaitre captive l’audience par son charisme habité et sa gestuelle de plus en plus agitée. L’économie de moyens de la mise en scène de Slimane Kacioui le laisse capter toute la lumière pour un numéro de soliste qui interroge sur la raison de ce qui ressemble à une crise de démence schizophrénique. Le drame côtoie l’angoisse dans une pièce qui interpelle sur la fragilité humaine.
Un classique de la folie humaine
A l’instar de l’Amok de Stefan Zweig, le Horla de Maupassant semble trouver ses racines dans les terres tropicales lointaines. Le héros anonyme d’abord nonchalant voit son trouble apparaitre tandis qu’il croise un 3 mats venu du Brésil amarré sur la Seine. Il mène une vie insouciante dans son immense demeure normande aux côtés de ses servants et s’agite de plus en plus au fur et à mesure de la pièce. D’aucuns penseront que l’indolence d’une existence de rentier inconséquent a pu atteindre ce célibataire sans histoires et sans ambitions. D’autres se souviendront que Maupassant souffrait lui-même d’hallucinations suite à une syphilis l’ayant mené à une tentative de suicide en 1892. Florent Aumaitre incarne ce quidam bouleversé par ce qu’il croit être une présence invisible le poursuivant inlassablement. Bien que non attaqué ou mis en danger, le personnage ne supporte pas ce qu’il considère comme une intrusion dans son territoire intime.
Un intense seul en scène
Le comédien déambule seul en scène pendant 1h20 de spectacle qui prend les spectateurs aux tripes. Les traits de son visage d’abord placides laissent peu à peu apparaitre la terreur de celui qui se croit victime d’un envoutement. Sa diction parfaite varie les intonations et les rythmes pour susciter la démence croissante. Le regard d’abord guilleret figure graduellement l’incapacité à se défaire d’un double qu’il ne peut voir mais que tout son être ressent comme une agression. Une carafe d’eau qui se vide pendant la nuit, les pages d’un livre qui se tournent toutes seules, il semble subir une présence invisible et oppressante qui fait dérailler son esprit. Jeux de lumière et musiques ponctuelles s’ajoutent aux simples chaise et tréteaux disposés sur scène par un Slimane Kacioui qui laisse toute la place au comédien et au texte de Maupassant. Nul besoin d’artifices pour rendre hommage à un ouvrage phare sur la folie humaine, découvert générations après générations par des cohortes d’adolescents subjugués par le récit d’un être qui se délite peu à peu.
Le Horla impressionne par l’art de son comédien d’insuffler une folie communicative sur la scène du Théâtre Michel. Quand la salve d’applaudissements finaux retentit, il est difficile de croire qu’il puisse revenir à la vie réelle en un instant sans passer par un long moment d’atterrissage. De quoi donner envie de repenser à une pièce qui bouscule, à découvrir avant le 6 mai prochain!
Dates : Du 29/03/2017 au 06/05/2017, les mardis et mercredis à 19h
Lieu : Théâtre Michel (Paris)
Metteur en scène : Slimane Kacioui
Avec : Florent Aumaitre