I feel fine pourrait être un teen movie de plus scrutant cette jeunesse américaine insouciante se perdant dans les substances et les fêtes décadentes. Bien au contraire, les réalisateurs Austin Spicer et Hailey Spicer prennent les spectateurs par surprise en auscultant le malaise d’un personnage adolescent atteint d’un syndrome proche de la bipolarité ou du trouble obsessionnel compulsif et sans cesse attiré par les abysses. Son sourire est permanent et son malaise persistant. Entre le dehors et le dedans, le fossé est grandissant, laissant le spectateur désemparé devant cette obsession constante pour le suicide et cette impossibilité de sortir de ce cercle morbide. Le parti pris est perturbant et le jeune Elijah Passmore crève l’écran dans le rôle titre.
Un détournement des codes salvateur
Le film débute avec une voiture filant à toute berzingue sur une route en pleine nuit, comme tant de films américains l’ont déjà fait. 3 amis rient à gorges déployées, chahutent bruyamment, l’american way of life se manifeste dans toute sa joliesse. Ozzy est l’un d’eux, pas le moins fanfaron, rien de dissemblable en apparence avec ses camarades. Sa gueule d’ange lui permet d’envisager l’avenir avec sérénité, il s’éprend d’une jolie camarade, les poncifs habituels sont là, jusque dans le titre du film qui clame qu’il va bien. Pourtant, il rumine et ressasse toujours la même obsession morbide, mettre fin à son expérience terrestre comme un mantra quotidiennement répété. Comme expliqué sur le net, le trouble obsessionnel compulsif est un trouble psychique caractérisé par l’apparition répétée de pensées intrusives — les obsessions — produisant de l’inconfort, de l’inquiétude, de la peur. Loin de toute volonté délibérée d’entretenir ce trouble, Ozzy est en est victime. Le traitement de cette pathologie est habituellement pris en charge par la médecine, avec un suivi et une médication appropriée, pour des résultats souvent satisfaisants. Le film en livre une version différente, laissant au jeune héros toute lattitude pour décider d’y remédier ou de se laisser aller. Malgré la famille aimante, les amis présents et la copine en tous points parfaite, sa psyché reste toujours tournée vers une issue fatale. Les réalisateurs n’engoncent pas le film dans un traitement uniquement malaisant, leur version du personnage principal est subtil et plein d’empathie, le rapprochant d’un James Dean à la mort peut-être pas complètement accidentelle, comme si lui aussi avait été attiré par les abysses.
I feel fine est une vraie belle surprise cinématographique issue d’un cinéma indépendant américain habitué à prendre le spectateur à rebrousse poil pour le faire réagir. Le teen movie se change en réflexion sur la fragilité de l’existence, ballotée autant par les évènements que par la psyché. Un film vraiment subtil et attirant.
Synopsis: Ozzy Taylor a tout pour être heureux mais il souffre d’un trouble obsessionnel compulsif. Entouré d’amis en or et de parents aimants, il affronte son obsession du suicide avec une joie de vivre indéniable.