Ikarie XB1, première sortie en salles françaises d’un monument de la SF de 1963
Tant de légendes ont circulé sur ce film tchèque réalisé en 1963 que pouvoir enfin le visionner en salles en 2017 tient du miracle. Considéré comme une influence majeure du 2001, l’odyssée de l’espace de Stanley Kubrick sorti en 1968, Ikarie XB1 est surtout une adaptation d’un roman de l’auteur polonais Stanislas Lem, à l’origine des Solaris de Tarkovski (1972) et Soderbergh (2002), soit un écrivain majeur de la SF contemporaine. Réalisé à une époque où la conquête spatiale opposait les Etats-Unis et l’URSS dans la course vers la lune, Ikarie XB1 a les défauts de ses qualités. Ambitieux et précurseur à sa sortie bien que n’ayant pas vraiment rencontré son public, le film devenu culte subit quelque peu l’outrage du temps qui passe, tant scénaristiquement que graphiquement en restant un tant soit peu figé dans son époque. Reste une expérience cinématographique non sans charmes qui invoque une époque où le bloc de l’Est savait offrir une alternative crédible et créative à Hollywood.
Un film sur l’inconnu intersidéral
Le scénario anticipe une conquête spatiale partie bien plus loin que notre lune voisine avec des camarades d’Europe de l’Est partis vers la constellation Alpha du Centaure en 2163 pour trouver une hypothétique forme de vie extraterrestre. Le voyage de 28 mois subit forcément les lois de la relativité générale, faisant passer dans le même temps 15 ans sur la terre. Le film propose une esthétique spatiale froide, voire glacée, qui préfigure le 2001 de Kubrick, avec tout de même un bémol, l’absence de vrais problèmes de gravité sur la station spatiale. L’équipage va devoir faire face à des difficultés imprévues, la première étant l’impact sur les organismes et les esprits d’un long voyage vers une destination située à 4,367 années lumière de notre système solaire. Le rythme lent du film rappelle les incunables d’époque, en premier lieu le Planète Interdite sorti en 1956. Palabres et plans fixes tranchent avec la profusion épileptique des films de SF du XXIe siècle. Les effets spéciaux ont quelque peu vieilli et insistent sur l’homme beaucoup plus que sur l’action. La deuxième difficulté tient à l’apparition d’une maladie à bord qui interroge sur la place de l’homme dans l’espace. Les grandes étendues vides de l’immensité spatiale sont-elles vraiment faites pour être traversés par l’être humain? L’atmosphère terrestre le protège des rayons cosmiques, ce qui n’est plus le cas une fois sorti de la carapace protectrice du vaisseau. D’où brûlures, souffrances et questionnement.
Tant de choses à découvrir
Enfin, le scénario ajoute une dimension presque magique avec l’apparition d’un vaisseau inconnu sur le chemin d’Ikarie XB1. Cet évènement interroge sur les mystères de l’espace temps et la petitesse de l’homme face à l’inconnu. Les scientifiques devisent longuement sur ces 3 écueils pendant que le vaisseau fait route avec un bruit d’aspirateur, rappelant la série Cosmos 1999 alors que tout le monde sait bien que l’absence d’oxygène dans l’espace empêche la propagation de tout bruit. Les caractères se dévoilent, les doutes aussi et surtout les questionnements sur le bien fondé d’une telle expédition. Le film privilégie l’ultra réalisme malgré les quelques écueils scientifiques pour susciter des interrogations sur l’avenir de l’espèce humaine. Rappelant qu’il fut un temps où la seule limite semblait le bout de l’univers, interrogeant sur le devenir de notre civilisation devenue très (trop?) terre à terre et dénuée de toute ambition spatiale. Comme si la fin de la confrontation Est/Ouest avait mis fin à toute velléité cosmogonique pour l’homme.
Ikarie XB1 est une curiosité qui ne manque pas d’intérêt. Le cinéma tchèque a pris les devants très tôt pour livrer un film passionnant même si daté. A découvrir en salles dès mercredi.
Pendant la seconde moitié du XXIIème siècle, à bord du vaisseau spatial Ikarie XB 1, un équipage se dirige vers la constellation Alpha du Centaure afin d’y trouver une nouvelle forme de vie extraterrestre. Si le voyage ne dure que 28 mois, 15 ans auront passé sur terre au moment où la mission parviendra à destination. Au cours de ce voyage, une quarantaine de scientifiques de tous pays apprennent à vivre ensemble et doivent faire face à quelques péripéties, telles que la rencontre avec un appareil spatial du XXème siècle, l’instabilité mentale d’un des passagers ou l’apparition de symptômes liés à une « étoile noire » radioactive.
Sortie : le 19 avril 2017
Durée : 1h28
Réalisateur : Jindrich Polák
Avec : Zdenek Stepanek, Radovan Lukavsky, Dana Medricka
Genre : Science-fiction