Kid Eternity, un récit horrifique exigeant
One Shot publié en 1991, Kid Eternity participe au renouveau de la bande-dessinée américaine de l’époque en s’adressant à un public adulte. C’est même à un public averti sinon avisé que les auteurs destinent leur album. Un duo exigeant et pointu composé du scénariste reconnu Grant Morrison (Les Invisibles, JLA, Seven Soldiers of Victory, Batman et Robin, Superman…) et du dessinateur Duncan Fegredo (Enigma, Judge Dredd, Jay & Silent Bob, Hellboy, MPH).
Date de parution : le 21 août 2015
Auteurs : Grant Morrison (Scénario) et Duncan Fegredo (Dessin)
Editions : Urban Comics
Prix : 15,00 € (160 pages)
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Résumé de l’éditeur:
Humoriste en difficulté, Jerry Sullivan broie du noir. Il s’est déjà fait à l’idée de la mort, et va bientôt en apprendre bien plus sur elle qu’il ne l’aurait souhaité. Rescapé d’un terrible accident de voiture, Jerry va faire la connaissance d’un étrange personnage appelé Kid, récemment échappé des Enfers et en route pour une mission d’importance cosmique que lui aurait confié les forces du Paradis eux-mêmes. Mais pour mener à bien sa mission, Kid aura besoin de Jerry pour libérer quelques-unes des figures les plus emblématiques de l’Histoire.
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Notre avis sur l’album :
Reconnu pour son talent et son influence, Grant Morrison l’est aussi pour la complexité habituelle de ses récits, loin d’être à la portée du premier venu. Le profane pourrait néanmoins saisir l’occasion de la parution de Kid Eternity pour se frotter à l’un de ses scénarios peut-être les plus accessibles. Encore faudra-t-il s’accrocher (on n’a pas dit que ce sera facile, hein !). Car Kid Eternity débute sans transition dans un univers foutraque ou tout part sans dessus dessous. Cette amorce vertigineuse du récit de Morrison finit par atterrir fort heureusement dans quelque chose de plus cadré où l’on parvient à identifier les tenants et les aboutissants de l’histoire.
On a bien du mal à saisir toute la pertinence qui fait sans doute Kid Eternity.
Pour résumer, Jerry Sullivan est témoin de visions horrifiques, meurtrières et sanglantes alors qu’un certain Kid prétend revenir des Enfers et avoir besoin des services de Jerry pour libérer un ami… Une histoire finalement assez classique. Mais c’est son traitement qui en fait une oeuvre loin des conventions et des cadres, surtout, on l’imagine, à son époque.
Faisant voler en éclat tous les standards d’alors, Kid Eternity, dont le récit peut désarmer, est aussi une oeuvre picturale très virulente. Un dessin désordonné où la peinture nous gicle à la figure dans un torrent de violence inouï. Signant son premier véritable comics, Duncan Fegredo se cherche et ne se trouve pas toujours. Là aussi, pourtant, on se fait fondre les rétines devant tant d’extrêmité. Un graphisme élitiste difficile d’appréhension. Surtout lorsque le découpage, le cadrage et l’agencement anarchiques des planches empêchent une lecture limpide.
On a bien du mal à saisir toute la pertinence qui fait sans doute Kid Eternity. Le comics – qui manque tout de même de structure – laisse la sensation de passer à côté d’une oeuvre iconoclaste et avant-gardiste, même près de 25 ans après. Tant pis pour moi.