L’Amant Double, un exercice de style à la limite du gênant
François Ozon livre avec L’Amant Double un thriller érotique dans la droite lignée de Sitcom, Gouttes d’eau sur pierres brulantes et Swimming Pool avec des personnages ambivalents aux lisières de la pathologie psychiatrique. Marine Vacth et Jérémie Renier se livrent à un mano a mano à la perversité anxiogène dans une ambiance résolument érotique. Les rebondissements sont nombreux jusqu’à un twist final surprenant. Le film est plongé dans une ambiance qui peine à ne pas verser dans le kitsch, générant quelques rires sonores malvenus dans la salle de cinéma, signe que la subtilité n’est pas forcément au rendez-vous dans cet étalage gratuit de chair triste.
Une intrigue confuse
Le réalisateur met la duplicité à l’honneur avec des protagonistes hantés par leur gémellité fantasmée ou avérée. Fragile et torturée, l’héroïne Chloé charme son psy et ouvre la boite de Pandore. S’en suit une relation déséquilibrée et la découverte d’un premier secret qui en amènera d’autres. Le jeu du chat et de la souris peut débuter pour une évolution lente mais irrémédiable vers un cul-de-sac existentiel. L’intrigue place ses pièces patiemment, presque trop, épaississant le mystère à coup de musique kitsch et de péripéties sans fin. L’Amant Double ne joue pas dans la subtilité et préfère le nu frontal pour dérouler explicitement le fil d’ébats mi-gratuits mi-voyeuristes. Là où Frantz par exemple privilégiait l’épure et l’ellipse, le film se laisse aller à une démonstration d’ébats bruyants et explicites, comme une fuite en avant vers l’inéluctable. Le film passe de l’appartement au cabinet du psy, encore et encore, avec des lits, des sous-vêtements et une sensualité omniprésente même si forcée. François Ozon transforme Marine Vacth et Jérémie Renier en couple complexe décomplexé, toujours sur la brèche et finalement toxiques pour la pathologie de l’héroïne.
Une frontière ténue entre thriller et absurde
Le réalisateur ne ménage pas le spectateur en dispensant (avec parcimonie heureusement) des images crues à la limite du graveleux. Les effets sont foncièrement excessifs, le spectateur est emmené avec force dans l’univers de manipulation de personnages transversaux et décalés. Les réactions dans la salle de cinéma laissent craindre que le ton martial recherché soit à la limite du kitsch pour un effet forcément à côté. A force de dévoiler les physionomies sans ménagement, François Ozon brouille le message et manque le coche. Le Thriller flirte un peu trop avec le porno soft des années 70 pour être considéré avec tout le sérieux recherché. Des personnages secondaires amènent des regards en biais qui concourt à l’ambiance de défiance sans pour autant complètement se justifier. Et cette musique… on se croirait chez Georges Romero, voire Dario Argento, sans forcément générer le même trouble chez le spectateur.
Au final, le film L’Amant Double semble surtout très long et la fin est accueillie avec un soulagement perceptible chez des spectateurs désabusés. Les circonvolutions de l’héroïne peinent à accrocher l’intérêt du public, le film apparait finalement bien gratuit, tel un exercice de style par trop désincarné.
Chloé, une jeune femme fragile, tombe amoureuse de son psychothérapeute, Paul. Quelques mois plus tard, ils s’installent ensemble, mais elle découvre que son amant lui a caché une partie de son identité.
Sortie : le 26 mars 2017
Durée : 1h47
Réalisateur : François Ozon
Avec : Marine Vacth, Jérémie Renier, Jacqueline Bisset
Genre : Thriller, Erotique
https://youtu.be/SUuDns5gn50