
Les Coiffeuses au soleil, Paris, 1966 (© Atelier Robert Doisneau)
Le monde selon Doisneau : poétique, drôle, obstinément humain
D’emblée, l’exposition nous renvoie à un univers familier : celui d’un Paris que l’on croit connaître, mais que Doisneau parvient toujours à réinventer. Pas de chronologie stricte ici, mais des séries thématiques – enfance, banlieue, ateliers, mode, gravité, où tout un monde s’immortalise et s’affirme, inépuisable et complice.
La salle consacrée aux enfants – espiègles, rebelles, libres – frappe fort. Ce n’est pas de la nostalgie, c’est une explosion de vie. Ces visages, cette insouciance, ces gestes volés au hasard, jouent avec l’espace, surgissent, comme un rappel que le regard captif du photographe était avant tout un acte d’affection, tendre et sincère.
L’exposition ne gomme pas la réalité du monde et sa dureté. On y croise des ouvriers de Renault, des mineurs, des marginaux sous un regard malicieux. Mais ici, l’humour n’étouffe jamais la gravité. Au contraire, il souligne une dignité et une humanité partagée, une fierté, entre clair obscur.
Un Paris populaire défile donc sous nos yeux, des banlieues d’à côté et cabossées, des ouvriers à la pause, des enfants qui rient, ces amoureux qui s’embrassent sans se soucier du monde. Doisneau, c’est un regard qui ne vole rien, mais qui reçoit tout — un sourire, une grimace, une larme, un éclat de vie.
Des portraits d’artistes sont aussi saisis : Picasso, Giacometti, Prévert, Malraux ou Beauvoir. D’une complicité rare, on y sent une relation intime entre Doisneau et ses modèles. Plus qu’un observateur, il est un camarade de jeu, un passeur d’âme.
Cette exposition capte ce passage : ces instants ne sont pas figés, ils s’ouvrent vers l’imaginaire. Et font résonner à jamais notre présent. Cet espace temps à vivre pleinement, intensément.
Le musée Maillol signe ici une rétrospective à la hauteur du maître : lumineuse, généreuse, accessible. On y retrouve ce qui fait la grandeur de l’artiste : la simplicité, la fantaisie, l’empathie.
Un « instant donné » qui, loin d’être figé, continue de vibrer, de nous parler, de nous émouvoir. À ne pas manquer pour tous ceux qui croient encore à la beauté des petites choses, à la magie du regard, à la poésie du quotidien et à sa tendresse.
Date : jusqu’au 12 octobre 2025 – Lieu : Musée Maillol (Paris)