L’humanité jaillit de la pièce La petite fille de Monsieur Linh au Lucernaire
Un vieil homme fuit un pays en guerre avec sa petite fille de quelques semaines dans les bras. Celui que l’on imagine sans mal originaire du Vietnam débarque dans un port d’une métropole occidentale, seul et sous la pluie. Seuls survivants d’un massacre, ils sont hébergés dans une sorte d’appartement pour réfugiés, sans connaitre ni personne ni la langue. Le vieil homme fait la connaissance d’un personnage aussi solitaire que lui. Une amitié étrange se noue entre les deux solitudes, évoquée dans un seul en scène aussi touchant que dramatique. Sylvie Dorliat interprète chacun d’eux tout en figurant une voix off douce et honnête. L’historiette touche à l’universel par la grâce de la conteuse alliée au texte délicat de Philippe Claudel.
Une pièce minuscule et vibrante
Le Lucernaire dispose un minimum de décors pour figurer une aventure portée par la seule comédienne présente sur scène. Elle interprète ce vieil homme débarqué de l’autre bout du monde avec sa petite fille. Après la mort de son fils et de sa bru, il n’a plus que ce petit être humain après qui s’occuper. Et rien ni personne ne pourra le détacher de Sang Diu, ce qui signifie matin doux dans sa langue natale. La comédienne illustre la maladresse et la bonne volonté de ce personnage qui a presque tout perdu. Des faisceaux lumineux projettent une douce lumière sur des draps disposés du sol au plafond. Un banc est disposé au centre de la scène, lieu de repos et de rencontre entre le réfugié et un vieux solitaire, veuf depuis peu et amateur de cigarettes. Le choc des cultures crée un pont entre deux personnalités blessées par la vie et seules dans l’immensité du monde. Sans pouvoir se faire comprendre, ils semblent néanmoins s’entendre et communiquer par les liens du coeur.
Un dénouement tragique
Le rythme lent de la pièce débouche sur une conclusion émouvante. La comédienne semble particulièrement bousculée par cette histoire qui communique une émotion très forte auprès du public présent. Il faudra de longues secondes avant que le premier applaudissement ne retentisse à l’extinction des lumières tant l’assistance semble prendre sincèrement part au trouble ambiant. Philippe Claudel a réussi sa tentative de figurer l’humanité dans les tourments les plus sombres. La démarche théâtrale atteint son but et La Petite fille de Monsieur Linh touche à l’universel, par l’alliage d’un texte à la simplicité apparente trompeuse et d’une comédienne visiblement habitée par ses personnages.
La petite fille de Monsieur Linh émeut le public et l’histoire reste longtemps incrustée dans l’esprit tant sa douceur parvient à touche au plus profond du coeur. Une belle pièce à découvrir cet été au Lucernaire pour gouter à la poésie de personnages dont on a peine à se séparer.
Dates : du 28 juin au 20 août, du mercredi au samedi à 19h, le dimanche à 15h
Lieu : Le Lucernaire (Paris)
Metteur en scène : Célia Nogues
Avec : Sylvie Dorliat