
L’instant dansé ou la résonance d’une époque
La Sydney Dance Company frappe fort avec ce double programme présenté à la Villette qui, à travers l’énergie, la physicalité des corps et l’abstraction, témoigne d’une époque.
« Impermanence », chorégraphié par Rafael Bonachela, s’ouvre sur un écran rectangulaire en fond de scène sur lequel se réfléchira à l’abri d’un effet lumineux saisissant et poétique : la pluie, les cendres et le feu.
Dans cette pièce, Rafael Bonachela juxtapose le beau et la dévastation en explorant la tension vitale entre ces deux sensations, à travers une approche chorégraphique à la fois abstraite et profondément émotionnelle.
La pièce puise son inspiration dans les incendies qui ont ravagé le bush australien et la cathédrale Notre-Dame de Paris, événements où la destruction donne paradoxalement naissance à une beauté singulière, celle de la fragilité, de la résilience et de la transformation.
Fluidité et musicalité du geste
Bonachela, d’une inspiration foisonnante, met en scène cette dualité en utilisant un vocabulaire gestuel et une abstraction d’une grande virtuosité : les corps des 17 danseurs, tantôt unis, tantôt dispersés, dessinent des flux et des ruptures, évoquant la force du collectif comme la solitude de l’individu face à la catastrophe.
La chorégraphie se déploie et vibre comme un organisme vivant entre mouvement de groupe, duos ardents et solos ciselés. Le tout exécuté dans une perfection éclatante.
Tandis que la musique composée par Bryce Dessner, interprétée en direct par le quatuor Zaïde, amplifie cette dualité : elle est tour à tour mélancolique, menaçante, hypnotique, portant la partition d’un monde en sursis. Les tableaux s’enchaînent sur une lumière incandescente et des ciels changeants, jusqu’au final porté par la chanson Another Word d’Anohni, qui délivre sa prière dansante pour un monde en renaissance.
Avec « Love Lock », Melanie Lane toute en audace, réinvente la danse collective avec une force ancestrale, un univers sonore électro tribal et un design visuel qui laisse en mémoire des images puissantes. Et s’affirme comme un manifeste récréatif, une ode à l’amour folk remixé pour un futur enfin reconnecté.
Dates : du 11 au 15 juin 2025 – Lieu : La Villette (Paris)
Chorégraphes : Rafael Bonachela & Melanie Lane