Robert Hirsch, grande figure du théâtre français, est mort à l’âge de 92 ans
Robert Hirsch, un des derniers monstres sacrés du théâtre français, est décédé jeudi à 92 ans à Paris, a annoncé à l’AFP le producteur de ses pièces Francis Nani, directeur du théâtre du Palais-Royal. Le comédien, qui disait ne jamais vouloir prendre sa retraite et avoir le théâtre pour “religion”, était encore à l’affiche ces dernières années de pièces à succès comme “Le Père” ou encore “Avant de s’envoler” de Florian Zeller, après 65 ans de carrière dont un quart à la Comédie-Française.
Robert Hirsch était hospitalisé depuis 48 heures après une chute à son domicile et son coeur “fragile, a probablement lâché”, a indiqué à l’AFP Jeoffrey Bourdenet, comédien et metteur en scène, qui était à ses côtés.
Le comédien devait à sa formation de danseur une exceptionnelle présence sur scène et une agilité qui ne l’aura quitté que dans les toutes dernières années. Il souhaitait continuer de travailler et “était à la recherche d’un rôle”, a témoigné M. Bourdenet.
Robert Hirsch a été distingué par de nombreux prix, dont un Molière d’honneur en 1992 et un Molière du meilleur comédien d’un spectacle de théâtre privé pour “Le Père” en 2014.
On se souvient de sa dernière apparition au théâtre de l’Oeuvre à Paris en 2016, dans la pièce du toujours Florian Zeller, et dont nous republions notre critique du spectacle.
« Avant de s’envoler » est une immersion sensible dans ce qui a été, ce qui est, et ce qui n’est plus face au temps qui passe et au départ d’un des membres du couple, uni depuis plus de 50 ans. Poignant.
Florian Zeller avec cette nouvelle création, retrouve Robert Hirsch (91 ans) et Ladislas Chollat à la mise en scène après la pièce « Le Père » récompensée par trois Molières dont celui du meilleur spectacle de l’année 2014 dans le théâtre privé et poursuit son exploration de la vieillesse confrontée à la peur de la perte, à la fragilité mais aussi à la vie envers et contre tout.
Robert Hirsch est André, vieil écrivain marié à Madeleine (Isabelle Sadoyan 88 ans) que l’on découvre au lever de rideau prostré devant la fenêtre ensoleillée de sa cuisine, tandis que sa fille Anne tente de le persuader qu’il est temps de « modifier l’organisation » face à « la situation ». Des fleurs sont livrées et ravivent le trouble causé par une absence à jamais pesante.
[…] la distribution est emmenée par l’incarnation surréaliste de Robert Hirsch […]
Puis arrivent des courses Madeleine et Elise, leur seconde fille. « Tu parles toute seule maintenant ? » interroge la mère. André reste muet.
De cette frontière entre le visible et l’invisible, l’ici et l’après, l’auteur, à l’abri d’un climat énigmatique à souhait mâtiné de fantastique, en explore avec force la perte des repères qui en résulte à l’instar des personnages confrontés à un réel perturbé et une mémoire réappropriée.
Le dramaturge nous fait ressentir avec beaucoup de profondeur la déstabilisation du clan familial face à l’inéluctable et la méfiance entre les membres qu’il fait naître où les certitudes de chacun sont mises à mal. Le patriarche s’arc-boutant à sa maison et à ses souvenirs intranquilles tandis que ses filles n’ont d’autres solutions que de préparer son placement en maison de retraite.
La mise en scène de Ladislas Chollat instaure un trouble et une tension où chaque personnage se déjoue à sa manière du réel et de sa vérité première.
La distribution – au plus près de cette traversée singulière : Isabelle Sadoyan, Anne Loiret, Claire Nadeau, François Feroleto et Léna Bréban – est à l’unisson emmenée par l’incarnation surréaliste de Robert Hirsch, convoquant à la fois dans son jeu Ionesco et Pinter.
Dates : du 5 octobre 2016 au 15 janvier 2017 l Lieu : Au Théâtre de l’Oeuvre (Paris)
Metteur en scène : Ladislas Chollat