Le réalisateur iranien Mehrdad Oskouei avait livré le déjà très puissant Des rêves sans étoiles en 2016 qui s’intéressait à un centre de détention et de réhabilitation pour mineures en Iran pour lequel il avait du attendre 7 ans pour obtenir une autorisation de tournage. Le réalisateur est de retour dans le même établissement pour Sunless Shadows où il suit le quotidien d’un groupe d’adolescentes accusées de meurtre sur la personne de leur père ou d’un membre de leur famille, le plus vouent avec l’aide ou la complicité de leur mère. Pas un sujet très répandu par ici!
Un documentaire qui prend aux tripes
La réalisation du film Des rêves sans étoiles avait valu à Mehrdad Oskouei une condamnation d’un an d’emprisonnement, à laquelle il échappa finalement. De cette expérience subsista une question sur laquelle il voulait pouvoir creuser un peu plus concernant les raisons qui peuvent pousser à tuer son père. Après d’encore grandes difficultés pour obtenir l’autorisation de tourner dans ce centre de détention, il réussit finalement à instaurer un climat de confiance pour échanger avec quelques jeunes filles pour les laisser s’exprimer et relater des souvenirs douloureux. Chaque jeune fille s’adresse directement à la caméra, sans voir l’interlocuteur et sans témoin de leurs propos. Chaque jeune fille déclenche l’enregistrement lorsqu’elle se sent prête à se livrer. Elles passent des messages à leurs familles ou à leurs mères, ou même au père qu’elles ont tué, avec des analyses sur leurs actes ou leurs motivations en toute sincérité. Chaque jeune fille revient assez peu sur les meurtres eux-mêmes ne laissant subsister que les raisons que chacun peut deviner, une lutte contre l’oppression au quotidien que subissent les femmes dans la société iranienne marquée par le poids de la religion et la présence omniprésente des mollahs. La violence subie par elles au sein de leurs foyers en est certainement la conséquence. L’page des jeunes filles surprend, elles sont jeunes, presque trop pour ce type d’accusations pour lesquelles les familles refusent souvent d’accorder un pardon qui les libérerait.
Le film est direct en présentant des jeunes filles qui ne dénoncent pas directement le système mais montrent la réalité des violences subies par les femmes en Iran. A noter que le film a reçu de nombreux prix dont en 2019 celui du meilleur réalisateur à l’IDFA (International Documentary Film Festival d’Amsterdam), et en 2020 le Grand Prix Nanook (Festival International Jean Rouch, Paris). Un film à voir pour en savoir un peu plus sur la réalité de la vie pour les femmes en Iran.
Synopsis: Le réalisateur suit la vie d’un groupe d’adolescentes qui purgent une peine dans un centre de détention pour jeunes filles coupables du meurtre de l’un des hommes de leur famille. Avec la caméra en témoin, elles révèlent leurs pensées intimes, leurs sentiments et leurs doutes.