Apocalypse Now est un film devenu mythique, rentré dans la légende du cinéma. Cette adaptation libre de l’ouvrage Au cœur des ténèbres de Joseph Conrad a changé de contexte, de temporalité et de scénario. Willard remonte une rivière du Vietnam pour trouver et éliminer le Colonel Kurz. Les péripéties s’enchainent tout au long du périple à l’instar d’un voyage initiatique. L’histoire du film est connue, la BD n’en est pas l’adaptation mise en bulles, si le film est connu, son tournage lui-même est moins connu en dehors du cercle des cinéphiles avertis. Une jeune femme membre d’American Zoetrope s’en fait la narratrice pour une BD qui ne manque aucun détail d’un tournage dantesque.
Un tournage cauchemardesque parfaitement retranscrit
Et pourtant, le tournage lui-même a tout d’un film d’aventure. Le réalisateur Francis Ford Coppola était à 2 doigts de péter un câble, l’acteur Martin Sheen a fait une crise cardiaque, le décor a été emporté par un typhon, le premier choix Harvey Keitel est viré manu militari, Marlon Brando doit improviser son texte, la drogue à profusion inonde les membres de l’équipe, autant d’évènements qui donnent au tournage des atours de malédiction divine. Dans un dessin ultra réaliste aux traits précis, Florent Silloray fait revivre toute une époque sur le papier dans un déroulé qui multiplie les flashbacks et les montages temporels. Les couleurs des bulles ravivent l’atmosphère mystérieuse des images du film, avec teintes sombres, touches enflammées et vert omniprésent de la nature environnante, encore augmentées par les couleurs psychédéliques des fumigènes multicolores. Pas de continuité temporelle mais un rythme ultra prenant pour un moment de lecture unique. Ajoutez quelques rappels historiques avec l’administration américaine qui fait grise mine et l’aide inopinée du régime philippin local pour finir les hélicoptères, vous obtenez une histoire complètement invraisemblable. Le lecture est palpitante, passionnante, un vrai plaisir de cinéphile bédéphile. Que le film obtienne la Palme d’Or au Festival de Cannes 1979 à égalité avec le Tambour a tout de la récompense divine pour remonter le moral du réalisateur durement éprouvé par un épisode hautement invivable. Quant à la vie du film, depuis le début de la post production jusqu’à la carrière en salles et même au delà, la lecture est digne des plus grands polars.
La lecture est nécessaire, pour se rendre compte de la difficulté de l’entreprise! Dur à croire, mais vrai, l’ambiance du plateau est retranscrite avec une énergie folle, chapeau!
Synopsis:
Le tournage réellement apocalyptique d’un des plus grands films du XXᵉ siècle
Philippines, mars 1976, début d’un tournage qui marquera l’histoire d’Hollywood : typhons, renvoi du premier rôle, climat détestable, maladie tropicale et drogue à gogo, caprices de stars et infarctus de l’acteur principal, dépression et paranoïa du réalisateur, budget incontrôlable et équipe en roue libre… Un enfer à l’origine d’un film culte ! Un tournage de plus de 18 mois. Un budget pharaonique qui met en faillite la Major qui produit le film. Plus de 300 km de pellicules tournées. 12 mois de montage. Une Palme d’or à Cannes en 1979.
Editeur: Casterman
Auteur: Florent Silloray
Nombre de pages / Prix: 160 pages / 24 euros