Verve et Intensité dans le dernier jour d’un condamné au Studio Hebertot
Victor Hugo n’est pas un auteur connu pour mâcher ses mots. Toujours enclin à vitupérer contre l’injustice de ce bas monde, il livre une charge vibrante contre la peine de mort dans son Dernier jour d’un condamné. Texte totem du théâtre parisien, chacune de ses adaptations exige du comédien seul en scène un investissement émotionnel total avec quelques litres de sueur comme offrande sacrificielle. Le comédien William Mesguich ne déroge pas à la règle et se met au diapason du texte enflammé avec une prestation habitée, soutenue par une mise en scène son/image/lumière/musique qui cadence et rythme la pièce.
Le poids des mots, la force d’un regard
Impossible d’évoquer la pièce sans souligner de prime abord la prestation fiévreuse de William Mesguich. Plus que son élocution parfaite et son impressionnant charisme, c’est surtout son art du déplacement et son usage de la mise en scène de François Bourcier qui fascine. Il parcourt un simple carré blanc figurant la cellule du condamné pour s’en échapper dans des digressions qui donnent du sens au calvaire vécu par le personnage. Il illustre le désarroi d’un quidam stigmatisé par la justice des hommes et frappé du sceau de l’infamie. Sans jamais connaitre la portée de ses actes, les spectateurs assistent aux derniers sursauts d’un individu lambda dépassé par un destin par trop funeste. En évoquant sa vie trop courte, ses espoirs déçus et tout ce qu’il ne pourra pas réaliser avec sa jeune fille, il évoque en filigrane l’injustice d’une mise à mort sommaire et infamante. La tension est soutenue par une bande son forte et classique (Erik Satie et Claude Debussy notamment), des effets de lumière fulgurants et des sons de geôle glaçants. L’exiguïté du cachot est figurée par ces traits de lumière s’échappant des interstices du parquet comme des phares de voiture dans la nuit. Le rythme enlevé de ce moment de théâtre fait passer le temps à une vitesse folle jusqu’à la salve d’applaudissements finale.
Le dernier jour d’un condamné frappe par son urgence et le ton soutenu de la démonstration. Le mot de la fin rappelle la suppression finalement récente de cette peine en France, soulignant le nombre trop important de victimes d’une justice aveugle à travers les siècles. Quant au comédien, inutile de rappeler une fois de plus la force de sa prestation. Encore une pièce immanquable au Studio Hebertot!
Dates : Actuellement
Lieu : Studio Hebertot (Paris)
Metteur en scène : François Bourcier
Avec : William Mesguich