L’Idéal, une charge frustrante contre les dérives du capitalisme
Avec L’Idéal, Frédéric Beigbeder porte à l’écran son roman Au Secours pardon et donne un grand coup de pied dans la fourmilière capitaliste. Mais si le film vise juste en dénonçant la totale et constante hypocrisie d’un système basé sur du rien vendu très cher, il n’évite pas le piège de la farce grotesque. A trop vouloir en faire, l’écoeurement guette et les bonnes dispositions entrevues dans le précédent L’amour dure 3 ans s’effacent devant une facilité illusoire.
Octave Parango est de retour. Après avoir dénoncé les travers de la pub dans 99FF, il revient pour stigmatiser le fascisme de luxe des marques arborant des gamines de 15 ans pour vendre leur rêve de jeunesse éternelle. Tout en profitant allègrement d’un système qui l’entretient. Octave est embauché pour mettre à profit ses talents de scout dans le but de dénicher la perle rare qui sauvera le géant mondial de la cosmétique de la déroute, L’Or… euh, L’Idéal.
Premier écueil, le casting. Le même Gaspard Proust qui incarnait Marc Marronnier dans L’amour dure 3 ans reprend le rôle d’Octave tenu par Jean Dujardin dans le 99FF de Jan Kounen. Vous suivez ? Même acteur mais personnage différent, de quoi s’y perdre et une preuve évidente du trop gros mélange des genres opéré par Frédéric Beigbeder. Demanderait-on à Tom Hanks d’interpréter Jason Bourne à la place de Matt Damon alors qu’il a déjà joué dans Captain Philips du même réalisateur Paul Greengrass ? Bref, c’est à peu près du même acabit. Détail peut être, mais une preuve significative de la trop grande décontraction du réalisateur. A trop empiler les niveaux de lecture, il se perd dans ce qui s’apparente à une comédie boursouflée sans saveur. Sous couvert d’une critique acide d’un système régissant les populations occidentales à coup de messages subliminaux permanents, le film déballe une quantité impressionnante de chair fraiche.
Oui, le corps de la femme est au centre du film. Bien plus qu’un opus centré sur un héros bêtement cynique et profiteur, le long métrage accumule les images outrancières en faisant croire qu’il les dénonce. Si les livres du réalisateur fonctionnent, c’est justement parce que rien n’est vraiment évident, tout baigne dans un brouillard flouté de vapeurs hallucinogènes. Ici, la chair est omniprésente, jusqu’à la nausée. L’humour pince sans rire de L’amour dure 3 ans se transforme en grosse machine pas subtile pour un sou, grossière et même tout à fait vulgaire.
Où s’arrête la critique et où débute la complaisance… Vaste sujet. Gaspard Proust s’est laissé pousser la barbe pour ressembler à son mentor, Audrey Fleurot promène sa sexytude rousse sans prouver grand chose, Jonathan Lambert est peut être le personnage le plus décalé et franchement drôle avec cet alliage de colère rentrée et de revanche sur le monde. Quant à la top model Camille Rowe, elle interprète une mannequin neuneu clamant ne faire aucune différence entre les races supérieures et les races inférieures… croustillant.
L’ancien concepteur-rédacteur Octave Parango de « 99 francs » s’est reconverti dans le « model scouting » à Moscou. Cet hédoniste cynique mène une vie très agréable dans les bras de jeunes mannequins russes et les jets privés de ses amis oligarques… jusqu’au jour où il est contacté par L’Idéal, la première entreprise de cosmétiques au monde, secouée par un gigantesque scandale médiatique.
Notre antihéros aura sept jours pour trouver une nouvelle égérie en sillonnant les confins de la Russie post-communiste, sous les ordres de Valentine Winfeld, une directrice visuelle sèche et autoritaire.
Entre les réunions de crise à Paris, les castings à Moscou, une élection de Miss en Sibérie, une fête chez un milliardaire poutinien et une quête des « new faces » aux quatre coins de l’ex-URSS, le fêtard paresseux et la workaholic frigide vont apprendre à se supporter et peut-être même à se sauver.
Sortie : le 15 juin 2016
Durée : 1h30
Réalisateur : Frédéric Beigbeder
Avec : Gaspard Proust, Audrey Fleurot, Anamaria Vartolomei
Genre : Comédie