A Perfect Day, film tragicomique et humanitaire de Fernando León de Aranoa
A Perfect Day ne fait pas uniquement référence à la célébrissime chanson de Lou Reed. Le quotidien d’une mission humanitaire au coeur du conflit yougoslave prête à rire autant qu’à émouvoir. Contexte guerrier pour un casting international de haute volée, Mélanie Thierry côtoie Benicio del Toro, Olga Kurylenko et Tim Robbins au milieu des atrocités commises par les belligérants. Le film louvoie entre comique pour mettre à distance et émotion devant le tragique des situations. Les personnages trouvent chacun leur manière de faire face pour ne pas sombrer et continuer à assurer leur mission. Un film qui interpelle et questionne finement sur la meilleure manière de venir en aide à des populations civiles victimes des exactions.
A Perfect Day joue la transparence et expose le quotidien le plus terrifiant en même temps que le plus banal en temps de guerre. L’équipe de l’Organisation Non Gouvernemental doit ménager les susceptibilités et ne pas sombrer dans l’abattement malgré la difficulté de sa mission. Diplomatie et mission de secours doivent se conjuguer en vertu d’accords internationaux ubuesques et des sensibilités de chacun. A Perfect Day dissèque les personnalités des personnages et les rapports de force à gérer quotidiennement. Le très sobre et toujours parfait Benicio del Toro est Mambru, chef de mission taiseux, aux longues heures de route dans tous les conflits de la planète et à la vie personnelle compliquée. D’autant qu’une de ses anciennes maitresses débarque sur le terrain des opérations. Tim Robbins incarne B, le mercenaire infatigable à l’humour désabusé devant les trop nombreuses atrocités vécues en spectateur. Mélanie Thierry et Olga Kurylenko sont des personnages féminins fragiles et fortes à la fois, la belle Olga est la fameuse maitresse qui pose problème à Mambru… Ce petit monde évolue au milieu des exactions et tente de venir en aide aux populations locales.
[E]ntre plages contemplatives et nervosité
Tonalité douce amère pour cette évocation d’un conflit sans combats ni échanges de tirs. Le danger est silencieux, la tension est palpable, le risque d’escalade est omniprésent, l’équipe est à la merci d’un tireur isolé ou d’un soldat un peu trop nerveux de la gâchette. Comment continuer à vivre dans un contexte si anxiogène ? Chaque membre de l’ONG a sa recette personnelle à base d’humour et d’ironie. Ce qui rend le film léger et sérieux à la fois. Cette tranche de vie rend les baroudeurs très humains et expose les raisons de leur engagement dans les missions humanitaires. Par gout du danger, d’une vie moins ordinaire ou par altruisme. Le rythme du film alterne entre plages contemplatives et nervosité. Un mélange qui fonctionne et donne une dimension autant documentaire que tragicomique à ce Perfect Day dramatique.
Fernando Leon de Aranoa réalise un film empli d’un second degré qui interpelle. Peut-on rire d’un conflit aux répercussions si dramatiques ? C’est peut être le remède pour continuer à vivre…
[Edit du 5 avril 2016] : Bénédicte de Loriol a vu A perfect day et a souhaité ajouter ci-dessous son ressenti sur le film. Les deux points de vue sont complémentaires ! Voici donc son avis :
Fernando León de Aranoa a fait une adaptation du livre de Paula Farias, Dejarse Llover. Paula Farias est à la fois médecin, humanitaire et écrivain. Elle passe sa vie en mission humanitaire et ensuite trouve le temps pour écrire ce qu’elle a vécu. Quant à Fernando León de Aranoa, il a déjà réalisé des documentaires et plus particulièrement Invisibles (2007) qui a reçu le Goya et qui était centré sur les interventions de Médecins sans frontières, en Ouganda. A perfect day raconte l’histoire de quelques humanitaires sur le terrain, au sein des Balkans, dans une zone en guerre.
On va suivre durant presque 48h, quatre humanitaires, et leur traducteur, en mission sur une terre en guerre. La mise en scène est étonnante de réalisme. On est dans les montagnes afghanes, au milieu de nulle part, mais truffées de mines et de pièges. Les humanitaires sont là pour aider la population locale. Ils doivent retirer un corps qui a été volontairement jeté dans un puits pour empêcher les gens d’avoir de l’eau potable. Et rien ne se fera facilement.
On est au centre d’un drame mais le réalisateur mêle humour et dérision pour supporter des scènes de guerre toujours insupportables. Le film rend très bien compte des situations souvent absurdes dans lesquelles se trouvent les humanitaires. Ils sont souvent pris au piège des différentes institutions qui les empêchent, au nom de la loi, de réaliser des tâches indispensables pour le bien-être de la population. Ici, tout est centré sur ce corps qu’il faut absolument extraire du puits pour rendre l’eau aux habitants. Soit ils vont avoir un problème de cordes, soit un problème avec les autorités militaires.
Le film met l’accent sur l’absurdité du système et la difficulté pour les humanitaires d’agir. Bien sûr, les humanitaires ont tous leur raison de devenir humanitaires. Et à travers un très beau casting, le film met l’accent sur le sens à donner à sa vie, au milieu d’un pays en guerre. Questions hautement philosophiques alors que leur vie est perpétuellement menacée durant leurs interventions. Une vache en plein milieu de la route est synonyme de mines.
Les paysages sont magnifiques et entretiennent cette dichotomie : beauté et cruauté humaine. L’humour prime et « efface » l’horreur absolue. Un beau film qui pourrait être qualifié de documentaire sur la Guerre des Balkans.
Un groupe d’humanitaires est en mission dans une zone en guerre : Sophie, nouvelle recrue, veut absolument aider ; Mambru, désabusé, veut juste rentrer chez lui ; Katya, voulait Mambru ; Damir veut que le conflit se termine ; et B ne sait pas ce qu’il veut.
Sortie : le 16 mars 2016
Durée : 1h46
Réalisateur : Fernando León de Aranoa
Avec : Benicio Del Toro, Tim Robbins, Mélanie Thierry
Genre : Drame, comédie
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