Le Théâtre des Champs-Elysées propose un opéra total les 3, 5 et 7 mars avec la mise en scène du Boris Godounov de Modeste Moussorgski. Originellement créé en 1869, une nouvelle version a été composée en 1872. Le livret est en russe pour une adaptation basée sur le drame du même nom d’Alexandre Pouchkine et sur l’Histoire de l’État russe de Karamzine.
Un opéra colossal
Le metteur en scène Olivier Py garde ses bonnes habitudes avec ses structures gigantesques qui habillent la scène tantôt en immeuble soviétique, tantôt en église orthodoxe, tantôt en échafaudage. La musique est écrite dans un style russe qui reflète la connaissance qu’avait le compositeur de la musique populaire russe pour un rejet volontaire de l’influence de l’opéra allemand et italien. Pouchkine s’était inspiré du Macbeth de Shakespeare avec un Boris qui devient tsar après avoir fait assassiner l’héritier légitime encore enfant, Dimitri. Bien que Boris gouverne humainement le pays, ce dernier sombre dans le chaos et la pauvreté. Un jeune moine vagabond en profite, Grigori, pour se faire passer pour Dimitri et réussir à épouser Marina, femme noble originaire de Pologne, qui déguise sa volonté de puissance en amour passionné. Après avoir convaincu le roi de Pologne de sa légitimité, le faux Dimitri convainc les Polonais d’envahir la Russie. Boris se fait submerger par sa culpabilité et sombre dans la folie pour finalement mourir en implorant la grâce divine. Si les morceaux de l’Opéra ne sont pas forcément très connus, un véritable courant mythologique parcourt le spectacle avec des références très appuyées à la situation actuelle en Russie. Chanteurs en tenue paramilitaire, icône de Poutine à côté de Staline, la mise en scène ne se prive pas de références contemporaines tout en conservant la profondeur spirituelle de l’œuvre de Moussorgsky avec un recours incessant à l’image d’un Dieu tantôt miséricordieux ou vengeur. Les structures montées sur scène donnent une hauteur monumentale aux chants des interprètes, à commencer par l’impeccable baryton Alexander Roslavets dans le rôle titre.
Le réalisme du livret offre une vraie profondeur psychologique aux personnages pour emporter les spectateurs dans un torrent historique, le Théâtre des Champs Elysées ne fait pas les choses moitié pour offrit un vrai moment de spectacle total.
Synopsis:
Le Boris Godounov de Moussorgski, inspiré d’une pièce de Pouchkine, connut plusieurs versions : une première composée entre 1868 et 1869, rejetée par la censure car il était alors interdit de représenter le tsar sur une scène lyrique et surtout par l’absence de rôle féminin principal, d’intrigue amoureuse et de scènes de ballet. Une seconde version voit le jour en 1872 et après de multiples péripéties et l’insistance de chanteurs vedettes de l’époque finit par être créée en 1872. Puis il y aura les temps des réorchestrations, celle de Rimski-Korsakov au tournant du siècle et plus tardivement celle de Chostakovitch. Quelle que soit la version, c’est surtout une réflexion sur la solitude du pouvoir et ses excès. Dans la version originelle de 1869, celle retenue pour cette nouvelle production, le drame est ramassé, très concentré dramatiquement. La noirceur du propos est soulignée par une orchestration à la fois sauvage et flamboyante, mettant à nu la psychologie du rôle-titre.
« Je veux que le son exprime l’idée, je veux la vérité » écrivait Moussorgski. Son récit sombre de la grandeur et de la décadence de Boris est une fascinante et troublante expérience théâtrale autant que musicale. Drame historique et fable politique, Boris est bien un titan lyrique au sein du corpus de l’opéra russe. Mais c’est surtout, une réflexion sur la solitude du pouvoir et ses excès. Il faut un titan pour porter ce rôle de colosse, incarné ici par Alexander Roslavets. A ses côtés, une équipe de chanteurs rompus à ce répertoire exigeant, l’Orchestre National de France et la baguette aguerrie d’Andris Poga.
Coproduction Opéra National du Capitole | Théâtre des Champs-Elysées
Avec le soutien d’Aline Foriel-Destezet,
Grand Mécène de la saison artistique du Théâtre des Champs-Elysées
France Musique diffuse cet opéra le 23 mars à 20h.
En partenariat avec france.tv