Contes du caniveau est l’œuvre du pionnier du manga alternatif des années 1960-1970 Tadao Tsuge. La BD est un recueil en français de ses œuvres parues initialement entre 1969 et 1974. C’est inédit, le premier de ses livres à paraitre en français contient 7 histoires parues principalement dans les pages du célèbre magazine Garo. Un second volume doit paraitre prochainement. Cette parution est l’occasion de mettre en avant une partie du catalogue manga à travers une opération commerciale dédiée au gekija. Un pin’s inédit a été créé à partir d’un dessin de Yoshihiro Tatsumi et cet objet sera offert dans les librairies participantes pour l’achat des Contes du caniveau ou d’un manga tiré d’une sélection de 14 titres.
Un manga historique
L’auteur s’est inspiré des ruelles misérables de Tokyo à l’époque de son écriture, et plus précisément celles d’un des quartiers les plus défavorisés de Tokyo, Tateishi. Les yakusas et les prostituées jonchaient les ruelles et les histoires racontées dans l’ouvrage reflètent la dureté du quotidien. Les personnages principaux sont des marginaux et des exclus représentés dans des chroniques abruptes écrites sans œillères ni concessions, bien loin des manges habituels souvent emprunts de romantisme ou de fantaisie. L’auteur met en avant la noirceur d’une société encore en construction après la seconde guerre mondiale et le bond industriel de l’après guerre. Tadao Tsuge décrit les laissés pour compte, les moins que rien et les petites gens sans perspectives. Ce sont des entraineuses, des proxénètes, des truands, des voyous et des alcooliques qui hantent les pages d’un manga qui se veut un héritage des temps anciens et un fidèle reflet d’une vérité mal connue aujourd’hui. La fatalité frappe les oubliés de la croissance économique prodigieuse et c’est une lutte pour la survie qui apparait au fur et à mesure des pages. D’un côté le progrès, de l’autre les parasites, la dichotomie est claire, l’auteur s’intéresse aux seconds. Le dessin montre les prémices des mangas actuels, moins stylisé, réaliste avant tout, en noir et blanc et sans couleurs. De quoi prendre conscience de la réalité difficile vécue pas ceux qui ne s’inséraient pas dans la marche en avant forcée vécue par le pays après 1945.
Ce premier recueil de nouvelles fait plonger dans un univers noir et gris, représentatif de ce qu’était la vie pour nombre des habitants de Tokyo à l’époque. Le pessimisme est roi et Tadao Tsuge a véritablement fondé le genre du gekiga (alias dessins dramatiques) aujourd’hui si répandu et célébré.
Synopsis: Recueil d’histoires parues au Japon entre 1969 et 1974. S’inspirant de ses souvenirs personnels, l’auteur dénonce les vices et les travers de la société japonaise d’après-guerre. Il met en lumière la rudesse de la vie en brossant le quotidien des truands, des prostituées et des autres laissés-pour-compte, qui luttent pour survivre dans un pays au bord du chaos.
Editeur: Cornélius
Auteur: Tadao Tsuge
Nombre de pages / Prix: 248 pages / 26,50 euros