Le Déni d’Anna au Lucernaire, du théâtre grinçant sur le mode tragi-comique

Le Déni d'Anna
Le Déni d’Anna, mise en scène d’Isabelle Janbrau, Le Lucernaire

Le Déni d’Anna au Lucernaire, du théâtre grinçant sur le mode tragi-comique

Après Ici il n’y a pas de pourquoi et Marie-Antoinette, la comédie dramatique ultra-réaliste et crissante Le Déni d’Anna débute sur la scène du Lucernaire. La disparition de la mère de famille Anna suite à une longue maladie suscite des réactions disparates chez les membres survivants de la tribu. A travers les années, les blocages persistent et occasionnent malentendus et maladresses entre le père de famille, ses deux rejetons devenus grands et la belle mère grincheuse. La pesanteur du sujet est contrebalancée par un petit théâtre de la vie illustré par des scénettes drolatiques qui mettent en relief le malaise ambiant et les tentatives pour le combler.

Une famille soudée dans le déni

Dès le départ de la pièce, une ombre semble roder au dessus des personnages. Anna reste invisible alors que cette mère de famille atteinte d’une pathologie irréversible ne cesse de hanter les discussions. Son mari François (Benjamin Egner) se démène pour préserver leurs enfants Diane (Sandra Parra) et Matthieu (Matthias Guallarano) en s’affairant dans les tâches élémentaires du quotidien avec une énergie qui interpelle. Le décor de la pièce s’anime de lits d’enfants, d’une table de cuisine et des éléments les plus basiques pour signifier le registre le plus banal. La belle-mère (Cécile Magnet) et l’oncle Antonio (Thibaut Wacksman) complètent bien vite le tableau d’une famille démunie face au drame. Il n’y a pas de bonne manière de faire face au deuil et le désarroi des adultes est palpable via leur incapacité à mettre des mots sur l’intolérable. Même pénible, l’évocation de la situation apporterait un apaisement qui manque cruellement à des personnages qui mettent sous le tapis la mémoire de la disparue. Les manies et tocs remplissent les trous créés par l’absence, suscitant les rires du public devant l’accumulation de maladresses.

Comment faire face à l’intolérable

Les expressions corporelles et les cheveux grisonnants figurent le temps qui passe. Les deux enfants deviennent des adultes qui décident de prendre les choses en main pour perpétuer le souvenir de leur mère trop tôt disparue. Les intermèdes entre les scènes voient deux musiciens égrener des notes mélancoliques à la basse (Daniel Jea) et à la batterie pour montrer l’omniprésence de la disparue et l’absence de repos. Les tentatives vaines pour remplir le quotidien des détails les plus futiles ne guérissent pas la blessure et les comédiens adultes interprètent parfaitement des personnages perdus et désemparés. Le Déni d’Anna séduit par la simplicité pertinente de sa mise en scène et les attitudes compassées d’êtres qui ne savent pas comment faire face à la situation. Impossible de leur en vouloir, le deuil est une affaire hautement personnelle et les enfants qui grandissent apportent une tentative de réponse qui bousculera le petit monde. Au delà du contexte particulier, la pièce interroge sur la notion même de déni dans toutes les strates de la vie et nul doute que de nombreux spectateurs se poseront la question de leur propre attitude face au monde qui avance, portant la question sur un terrain beaucoup plus large.

Le Déni d’Anna interpelle l’audience par l’acuité du sujet annoncé. Les 1h40 du spectacle accumulent les situations tendues et les bévues avec une belle récurrence pour un moment  de théâtre tragi-comique à découvrir au Lucernaire.

Dates :  à partir du 15 mars 2017, du mardi au samedi à 21h, le dimanche à 19h
Lieu : Le Lucernaire (Paris)
Metteur en scène : Isabelle Jeanbrau
Avec : Benjamin Egner, Karine Huguenin ou Sandra Parra, Matthias Guallarano, Thibaut Wacksmann, Cécile Magnet, France Cartigny ou Bertrand Noel ou Maxime Aubry

NOS NOTES ...
Originalité
Mise en scène
Jeu des acteurs
Texte
Stanislas Claude
Rédacteur ciné, théâtre, musique, BD, expos, parisien de vie, culturaddict de coeur. Fondateur et responsable du site Culturaddict, rédacteur sur le site lifestyle Gentleman moderne. Stanislas a le statut d'érudit sur Publik’Art.
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