Escobar, la démesure folle d’un magnat de la drogue
Pablo Emilio Escobar Gaviria ne cesse d’inspirer les scénaristes et les réalisateurs depuis quelques années. En devenant l’homme le plus riche du monde grâce aux revenus de la drogue au début des années 80 avant de basculer dans la folie meurtrière jusqu’à ensanglanter la Colombie toute entière, il a tout simplement accédé au statut de mythe contemporain. Plus riche que les fortunes héréditaires, plus puissant que le gouvernement colombien, plus implacable que les tueurs les plus cruels, il a tout gagné avant de tout perdre. Tel Icare, il a touché le soleil du doigt avant de disparaitre dans le sang. Fernando León de Aranoa en livre une version ultra violente portée par des acteurs au diapason, Javier Bardem en tête. Le film détrône-t-elle pour autant la série Narcos? Pas certain.
Une version plus qu’honnête sans être la meilleure
Wagner Moura dans Narcos et Benicio del Toro dans Paradise Lost ont mis la barre très haute, jusqu’à questionner sur la légitimité d’une version de plus. Sauf que Javier Bardem a le côté charmeur du premier et animal du second, avec son regard de bel hidalgo à la fois séducteur et dangereux. Il est le point fort d’un film moins détaillé que la série et moins sauvage que le second, au milieu des deux, avec pourtant quelques scènes à la limite du supportable tant le réalisateur choisit d’appuyer sur la bestialité d’un criminel sans pitié. Son ascension est ici assez rapide, surtout comparé au temps que se donne la série pour développer son histoire. Et la chute est elle aussi rapide. Son idylle avec la présentatrice télé interprétée par l’épouse de l’acteur à la ville Pénélope Cruz apporte une touche de sensibilité sans pour autant représenter le noeud du film. Elle se questionne, s’extasie puis se liquéfie de crainte. Elle est surtout la narratrice de l’histoire, la témoin privilégiée, le trophée remporté par le matador pour imposer sa stature. Les agents de la DEA ont ici un rôle presque anecdotique, Peter Sarsgaard apporte son flegme habituel mais n’intervient presque jamais sur le terrain, car le terrain est marqué par la lutte entre les trafiquants rivaux et les militaires.
Un problème principal: la langue
La série Narcos avait le bon gout de faire parler chaque protagoniste avec sa langue natale. Voir ici Escobar parler avec ses enfants en anglais, même avec un accent espagnol à couper au couteau, fait presque sortir du film. Pourquoi ne pas conserver le très bon principe instauré par la série et que d’autres films comme Silence auraient gagné à adopter? Escobar est colombien, en Colombie on parle espagnol, c’est simple, basique, crédible. Le film élude également quelques morceaux de bravoure de la carrière du narcotrafiquant, tel la prise du palais de justice de Bogota en 1985 ou l’expression autant célébrissime que véridique Plata o Plomo qui a fait les beaux jours de la série. Le film est efficace est retrace une histoire rentrée dans la légende collective. Même amoindri par le malencontreux choix de l’anglais, le film reste efficace et se regarde grâce à la prestation habitée de Javier Bardem au diapason et habitué du réalisateur avec cette 3e collaboration. Le film est tourné en milieu naturel, dans les lieux historiques notamment à Medellin pour un réalisme exacerbé.
Escobar n’apprendra rien de plus aux fans de Narcos mais offre une interprétation totale à Javier Bardem en baron de la drogue cruel et sans limites. Pas vraiment un film promu par l’Office du tourisme colombien à voir la tonne de chaire humaine fraiche distribuée tout au long de l’action.
Impitoyable et cruel chef du cartel de Medellin, Pablo Escobar est le criminel le plus riche de l’Histoire avec une fortune de plus de 30 milliards de dollars. « L’empereur de la cocaïne » met la Colombie à feu et à sang dans les années 80 en introduisant un niveau de violence sans précédent dans le commerce de la drogue.
Fascinée par son charisme et son pouvoir, la très célèbre journaliste Virginia Vallejo, va s’apercevoir qu’on ne s’approche pas de l’homme le plus dangereux du monde impunément…
Sortie : le 18 avril 2018
Durée : 2h03
Réalisateur : Fernando León de Aranoa
Avec : Javier Bardem, Penélope Cruz, Peter Sarsgaard
Genre : Drame, Biopic, Policier