Fantasmes et réalités sur les sex addicts, Docteur JC Matysiak nous dit tout (JC Lattès)
Docteur JC Matysiak est psychiatre avant d’être écrivain. Il est chef du service de traitement des maladies addictives de l’hôpital intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges (94). Mais Docteur JC Matysiak avant d’écrire ce livre en a écrit de nombreux autres, la plupart sur les addictions.
Cette chronique n’est qu’une présentation succincte de ce livre très riche qu’est Fantasmes et réalités sur les sex addicts. Il m’est en effet impossible de vous « résumer » cet essai très ouvert sur différents domaines et différentes représentations mentales. Je ne peux que vous inciter à le découvrir par vous-même.
Cette fois-ci, Docteur JC Matysiak nous fait découvrir, à travers de très nombreux patients, des problèmes liés à notre sexualité. Uniquement notre sexualité. Il aborde un peu tout de même les problèmes liés aux drogues et à l’alcool qui font partie des addictions.
Avec beaucoup de professionnalisme, il nous donne sa propre conception de la sexualité dite normale. Mais ce n’est pas le but du livre. L’objectif qu’il s’est fixé, enfin si j’ai bien compris, est de nous démontrer qu’il est bien difficile de définir une anomalie de la sexualité comme étant une maladie. Pour lui, par exemple, l’hypersexualité est signe de bonne santé mentale. Mais bien sûr, chacun réagit différemment en fonction de son éducation et aussi de sa religion. Pour l’un telle attitude serait perverse alors que pour d’autres ce serait une sexualité normale, vécue sans contrainte. Difficile de parler de norme en matière de sexualité qui est tellement empreinte de notre condition sociale, culturelle, morale et religieuse sans parler de notre propre parcours de vie. Tout est interdépendant.
« […] Tracer plus précisément cette frontière, certes ténue mais fondamentale, pour ne pas transformer nos simples mauvaises habitudes ou excès en maladies. » (p.224)
[…] qu’il est bien difficile de définir une anomalie de la sexualité comme étant une maladie.
Mais il est vrai que la sexualité a beaucoup évolué ces dernières années. L’homosexualité était considérée comme une maladie mentale jusqu’en 1960. Ce qui peut nous paraitre complètement impensable aujourd’hui.
« Le développement des addictions est parallèle à l’affaiblissement des cadres moraux. » (p.274)
Nous sommes en France et notre mentalité n’a rien à voir avec celle des Américains, par exemple. Chez eux, l’adultère est considéré comme une réelle maladie et ils ont créé de nombreux centres, excessivement onéreux, pour guérir de cette pathologie, (ex : Tiger Woods a dû se confesser publiquement sur ses nombreuses relations extra-conjugales en sortant d’une cure). Pour l’auteur, l’infidélité n’est absolument, en aucun cas, une maladie. Cela ne va pas dire pour autant qu’il faille être infidèle pour être heureux !
Avec Internet, tout a changé dans notre vie quotidienne mais également dans notre vie sexuelle. Les enfants peuvent avoir accès facilement à des sites porno, et y prendre même une part active. Et ce, à n’importe quel âge. On imagine bien le danger que cela représente, ainsi que les répercussions sur la vie sexuelle de ces jeunes.
« Pour toute source de plaisir, ou de soulagement, il existe, de fait, un risque de dérapage et de dépendance, et, pour un individu donné, il est très difficile de savoir à quel moment commence l’abus, et quand se profile l’addiction. » (p.116)
Pour l’auteur, l’infidélité n’est absolument, en aucun cas, une maladie.
La frontière est difficile à percevoir entre le fait d’avoir une sexualité différente des autres, riche et variée, et une sexualité qui ferait davantage penser à une maladie mentale, faite d’addictions ou de perversions. Il est naturel, d’après l’auteur, que la femme trompée considère immédiatement son mari comme malade et exige qu’il se soigne. C’est d’ailleurs souvent elle qui accompagne son mari à la consultation. Alors qu’en réalité, d’après le Docteur JC Matysiak, il ne souffre d’aucune maladie. Et toute thérapie ne peut être efficace que si c’est la personne elle-même qui a envie de cette thérapie et qui en ressent le besoin.
« Les troubles du contrôle des impulsions vont donc avant tout concerner des personnes ne supportant pas la frustration (ou le simple fait de différer leur plaisir) et qui mettent en œuvre des conduites leur procurant une satisfaction immédiate.
Le pervers ne peut maîtriser ses pulsions, mais il sait parfaitement que cela vient en affrontement avec la loi et que cela est répréhensible, même s’il tente de le minimiser très souvent… pour certaines conduites virtuelles. » (p.192)
A travers ses nombreux témoignages de patients, le Docteur JC Matysiak nous explique très simplement ce qu’on entend par fantasmes, ou maladies du sexe comme l’inhibition ou les paraphilies, en passant par le voyeurisme, l’exhibitionnisme et la pédophilie. On essaie de comprendre les personnes atteintes d’addictions ou de perversions.
Nous avons tous des fantasmes, plus ou moins élaborés. Et ce livre va nous aider à essayer de comprendre telles ou telles attitudes, soit de notre conjoint, soit de nous-mêmes, ou de nos adolescents. Quelle attitude adopter quand on découvre notre jeune ado en train de se masturber devant des sites porno, et ce, à longueur de nuit ou même de jour ?
« […] le meilleur traitement est souvent le temps, et la vie comporte, heureusement, bien des évènements prévisibles ou imprévisibles qui vont mener une personne à mûrir, à prendre du recul, à se remettre en question et à changer. » (p.227)
Aucune possibilité de cataloguer telle ou telle attitude comme on serait tenté de le faire.
Dr Matysiak explique avec des mots simples et beaucoup de pudeur la réalité qui touche le monde très secret de la sexualité. Tous les domaines sont abordés sous un côté médical mais surtout humain. Aucune possibilité de cataloguer telle ou telle attitude comme on serait tenté de le faire. Ce n’est pas si simple.
Ce livre est là pour nous aider à mieux nous comprendre nous-mêmes, à mieux appréhender le mystère de notre sexualité, à mieux comprendre notre conjoint, ou nos enfants. Après avoir lu ce livre, ce qui ressort très nettement est le non-jugement de l’auteur, une forme de déculpabilisation. Les cas les plus pervers relèvent de la justice et non de la médecine, mais ils sont rares. Il conclut sur trois mots-clés dans toute relation de couple : respect, consentement, réciprocité, pour une sexualité épanouie.
Dr Matysiak conclut très joliment son livre : « A chacun d’entre vous sa réponse. » (p.273) ! Ce qui peut vouloir dire : à chacun ses fantasmes et à chacun de les gérer au mieux, en accord avec soi-même, avec son conjoint et avec la société dans laquelle on vit ! Mais à chacun son interprétation !
Notre sexualité et nos pratiques n’échappent pas à la tentative de normalisation d’une société qui culpabilise tout débordement de notre recherche de plaisir (alcool, alimentation, jeux…). Il nous faudrait jouir, au sens large du terme, mais surtout sans excès.
Cet essai se propose de mettre à jour les dérives d’une récupération excessive, par la médecine et la psychiatrie, de certaines de nos conduites sexuelles, même excessives, qui ne sont en rien une maladie. Être hypersexuel ne signifie pas être déviant ou malade inéluctablement.
Les récents cas, très médiatisés, des frasques sexuelles de personnalité, ont été l’occasion de mettre à jour cette dérive sociale. Tour à tour ont été convoqués les termes de perversion, d’addiction sexuelle ou encore de maladie mentale, qualifiant des conduites qui ne relèvent bien souvent que de l’infidélité, de besoins sexuels au-dessus de la moyenne, de perte de contrôle ou de conduites pénalement condamnables.
Ce livre, basé sur de nombreux cas cliniques et une expérience de plus de trente ans de prise en charge des addictions, se propose de redonner à la maladie sa juste place. L’addiction sexuelle ne sert elle pas souvent de prétexte à des conduites, certes excessives, mais qui ne relèvent en vérité que de la morale, de diktats religieux ou d’une vision sociale de la normalité à une époque donnée ?
Cette culpabilisation sociale, morale ou religieuse, de certaines de nos pratiques sexuelles, incite de nombreuses personnes à pousser la porte des addictologues ou des psychiatres, alors qu’ils ne sont en aucun cas malades.
Mais alors, peut-on définir une sexualité « normale » ? Cet essai tente également d’en cerner les contours mouvants.
Date de parution : le 6 avril 2016
Auteur : Docteur JC Matysiak
Editeur : JC Lattès
Prix : 18,50 € (250 pages)
Acheter sur : Amazon