Génie la folle, ou un cri d’amour d’une fille envers sa mère (Denoël)
Génie la folle est déjà paru aux Editions Denoël en 1976. Dès sa sortie, il a reçu le Prix des Deux Magots. Il vient d’être réédité par ce même éditeur et ce, pour notre plus grand bonheur ! Inès Cagnati était professeur de lettres et a écrit de nombreux romans et nouvelles. Elle est décédée en 2007.
Histoire
Inès Cagnati avec Génie la folle donne la parole à une petite fille, Marie. L’histoire est très simple : Marie court après sa mère et aimerait tellement lui crier son amour. Mais sa mère semble sourde…
Mais sans vraiment comprendre la situation, Marie comprend qu’elle ne doit pas importuner sa mère. La situation de Marie et de sa mère, Eugénie, dite Génie la folle, est quasi inhumaine. La famille d’Eugénie l’a rejetée le jour où elle a su qu’elle était enceinte. Du coup, Eugénie est partie et se débrouille complètement seule pour élever sa petite fille. Elle fait toutes sortes de travaux des champs, à la ferme, dans les cuisines… Elle s’épuise, son regard est vide, elle ne parle pas ou très peu. Et Marie est en permanence en attente d’un geste de sa mère, d’un mot, d’une parole ou même d’un simple regard… Souvent l’auteur répète les mêmes phrases, les mêmes actions, pour alourdir encore la situation, l’absurdité de la vie d’Eugénie et du coup de celle de sa fille. Si la mère n’aime pas sa fille, on se doute bien du pourquoi, mais ça n’empêche pas la fille d’adorer sa mère et d’être en permanence en quête d’une preuve d’amour ! C’en est bouleversant. A tout moment, la petite Marie craint d’être abandonnée par sa mère. Et en même temps, elle aimerait tellement lui redonner le sourire.
Maternité et amour, pas une évidence
Bien sûr, l’ambiance est lourde, triste, mais l’écriture est d’une telle justesse, d’une telle simplicité qu’elle rend les personnages attachants. La lecture en est souvent bouleversante.
Génie la folle aborde des thèmes tellement durs, mais tellement vrais, que lire ce livre est presque une obligation en ce jour où on parle beaucoup de violences faites aux femmes. D’une part, la femme est au cœur même du récit, la femme maltraitée qui n’a pas droit de se plaindre, et ensuite, Inès Cagnati analyse avec finesse les rapports mère-fille ou plus exactement fille-mère, la mère ayant des grosses souffrances affectives. Beaucoup de non-dits, entre les mots, comme les silences de la mère face à sa fille. On imagine le pourquoi du comment tout au long du livre.
Le malheur rend prisonnier et ce, sur plusieurs générations… Mais le silence domine… Et le malheur s’acharne encore et encore comme si ça ne suffisait jamais… Pas de happy end dans Génie la folle…
Un très beau livre, au style répétitif, comme le malheur. Sans échappatoire.
Marie, la petite bâtarde, parle de sa mère.
Sa mère, c’est Génie la Folle, cette fille de bonne famille qui, rejetée, s’est faite domestique agricole. Sa mère, c’est ce mutisme terrible opposé à tout et à tous, à la méchanceté, à la ladrerie, à l’indifférence. C’est le mystère de cette ombre silencieuse que Marie poursuit de son amour passionné et pathétique, que Marie attend sans fin, le soir, rêvant de l’emmener loin, là où de nouveau elle pourra rire.
La petite Marie parle de sa mère . Malgré cette vie semée de malheurs et parce qu’elle a appris à tout transformer en amour, c’est un tableau non seulement intense, fort et poignant, mais d’une beauté presque terrifiante qui consacre le talent de l’auteur du Jour de congé.