La bataille d’Alger est un film âpre car très réaliste et extrêmement crédible. L’armée française de bat pour conserver l’Algérie française, au prix de la torture, d’une répression sanglante et des actions aveugles de l’OAS. Cette plongée dans une page douloureuse de l’histoire récente de 2 pays se regarde avec attention et le sentiment d’un immense gâchis. Pas de héros ni d’ennemis, juste des victimes. Et la scène de fin avec la liesse de joie de la population ne peut cacher les exactions, les règlements de compte et l’impasse actuelle, 50 ans après…
Un film douloureux
La grande spécificité du film est d’avoir été tourné avec une majorité d’acteurs non professionnels. Seule exception notable, l’acteur Jean Martin dans le rôle du colonel Mathieu qui dirige la troupe très organisée des parachutistes français. La Bataille d’Alger traite de l’impasse d’une situation sociale où personne n’est prêt à lâcher du lest, ni les combattants algériens de l’ombre, ni les pieds noirs. La lutte pour le contrôle de la Casbah durant cette période de trouble est le nœud central de l’affaire. La population locale est jeune, déterminée et bien organisée. Le scénario s’inspiré du récit de Yacef Saadi, un chef de la résistance urbaine à Alger. Il joue son propre rôle. Le film a été présenté à la Mostra de Venise, la délégation française protesta avec force contre cette représentation d’un conflit qui n’a pas encore refermé ses blessures si on en juge par le polémique actuelle suscitée par Emmanuel Macron. Le festival a d’ailleurs récompensé le film de Gillo Pontecorvo et on comprend pourquoi. Tout le monde se bat jusqu’à la mort pour obtenir, soit l’indépendance soit la conservation. Malgré le Lion d’Or à Venise, le prix de la Critique à Cannes et trois nominations aux Oscars à Hollywood, le film ne sortira en France qu’en 1971 avec un visa d’exploitation retardé par les autorités, preuve de la crispation autour de l’affaire. Un engin explosif détruisit d’ailleurs le cinéma le Saint-Séverin à sa sortie… Et ) Lons-Le-Saulnier, un commando détruit l’écran et détruit la copie du film à l’acide sulfurique. Charmant.
La ressortie du film 50 ans après en version restaurée 4K inédite est l’occasion d’apprécier un récit douloureux sur une lutte sans issue des français pour garder l’Algérie, et des algériens pour garder leur autonomie. De l’eau a coulé sous les ponts et la situation politique en Algérie n’est pas bien reluisante. Reste un film d’une puissance inouïe, à visionner en salles le 13 octobre.
Synopsis: Octobre 1957. Les paras du colonel Mathieu cernent le refuge d’Ali-La- Pointe, responsable de la guérilla urbaine. Pendant ses heures de réclusion forcée, Ali revit l’itinéraire qui l’a conduit de l’état de délinquant et proxénète à celui de chef guérillero du F.L.N. Novembre 1954, l’organisation terroriste entreprend son activité en Algérie ; ce sont les premiers attentats à la bombe dans les bars, les gares et les cinémas de la « ville européenne ». Ali devient l’un des chefs de l’organisation, sous la direction de Ben M’Hidi, alors qu’arrivent à Alger les parachutistes salués par la population européenne. Le colonel Mathieu, mettant à profit une grève, pénètre dans le quartier arabe et procède aux premières arrestations…