Une langueur toute asiatique dans Adieu Mandalay
Un couple de jeunes birmans émigre clandestinement dans la Thailande voisine pour améliorer leurs conditions matérielles. Adieu Mandalay raconte la précarité autant que leur détermination à ne pas baisser les bras. Car les tourtereaux s’éloignent irrémédiablement par la faute de leurs différences de vue quant à leur avenir. Elle veut obtenir des papiers pour commencer une nouvelle vie, lui veut accumuler assez d’argent pour revenir en Birmanie. La caméra plonge dans un quotidien plein de langueur et de contrariétés pour un film à l’hyper réalisme exacerbé entre corruption omniprésente et exploitation de la misère humaine. Adieu Mandalay ouvre une lucarne sur une tranche de vie retorse.
Une tranche de vie laborieuse
Trajet à l’arrière d’un camion, balade en moto, plats de riz dégustés bruyamment,, travail à l’usine, le réalisateur Midi Z fait plonger dans le quotidien le plus élémentaire pour saisir les tourments intérieurs de personnages en plein changements de vie. Les péripéties sont rares dans des vies faites de silences et de regards éteints. Les birmans clandestins sont des proies faciles pour des exploiteurs sans vergogne qui profitent d’une main d’oeuvre bon marché et corvéable à merci. C’est un peu de l’occident du XIXe siècle qui semble reprendre vie, entre des Cosette et Lantier décidés à s’en sortir sans revendications ni luttes ouvrières. Les tranches de vie sont montrées sans effets ostentatoires, les gestes sont appliqués, les esprits sont absents, faisant toucher du doigt l’existence des migrants partout à travers le monde. Le labeur n’est pas vécu comme une servitude mais comme une opportunité et il ne manque pas grand chose pour apporter le contentement le plus complet. La jeune Liangqing (Wu Ke-Xi) recherche désespérément des papiers, Guo (Kai Ko) se perd corps et âme dans son travail pour accumuler de maigres richesses. Et tous deux s’éloignent irrémédiablement.
Un film asiatique typique
Le rythme du film se veut le plus aride possible, insistant sur un quotidien sans artifices ni maquillages où tout reste à faire. Adieu Mandalay exhume un peu de l’esprit de la dictature birmane en train de s’ouvrir au monde à deux pas d’une Thaïlande déjà versée dans l’économie de marché. La dichotomie s’expose constamment, les birmans sont quelque peu stupéfaits de ce que le pays voisin peut potentiellement leur apporter. Mais tout a un prix et qui n’a pas suffisamment de subsides doit batailler pour s’en sortir. L’accomplissement de soi semble ici se faire au détriment de l’amour et de sentiments passés dans un plan secondaire. Le mariage et la famille sont mis à distance, repoussés dans un avenir plus ou moins lointain. Les compatriotes sont là pour aider à mesure de leurs moyens pour un rayon d’espoir dans un quotidien rendu gris par la manière de film du réalisateur.
Adieu Mandalay propose une réalisation aussi terne qu’exsangue pour une tranche de vie toute en potentialité et en vexations. Une langueur qui tranche avec la tragédie finale, inattendue et tranchante comme une lame de rasoir. Une expérience cinématographique pleine de sens.
Liangqing et Guo, deux jeunes birmans, émigrent clandestinement en Thaïlande. Tandis que Liangqing trouve un emploi de plonge dans un restaurant de Bangkok, Guo est embauché dans une usine textile. Sans papiers, leur quotidien est plus que précaire et le jeune couple ne partage pas les mêmes ambitions : si Guo veut gagner assez d’argent pour retourner en Birmanie, Liangqing est prête à tout pour obtenir un visa de travail et échapper à sa condition.
Sortie : le 26 avril 2017
Durée : 1h48
Réalisateur : Midi Z
Avec : Kai Ko, Wu Ke-Xi, Wang Shin-Hong
Genre : Drame