Le choc Climax actuellement au cinéma!
Tantôt décrié, tantôt porté aux nues, Climax mérite pourtant largement le détour. Gaspard Noé propose un film iconoclaste entre chaos et anarchie, avec une bande son furieusement 1996 et majoritairement portée sur la techno avec Daft Punk, Dopplereffekt, Cerrone ou Aphex Twin. Si la scène de début fait l’unanimité par la flamboyance de sa furieuse scène de danse interprétée par une cohorte d’interprètes aux qualités physiques impressionnantes, les apartés suivent vite pour laisser place à un lâcher prise dramatique facilité par l’absorption d’une sangria infectée par une drogue inconnue. Commence alors une véritable descente aux enfers, perturbante et passionnante, en tout cas peu recommandée aux âmes sensibles.
Un film d’abord follement technoïde…
Située en 1996, Climax se situe avant le déploiement insubmersible d’Internet et du téléphone portable de manière généralisée. La French Touch bat son plein et fait danser les protagonistes sur des gros beats bien gras qui rendront nostalgiques plus d’un spectateur. Les références sont nombreuses mais le style de Gaspard Noé se veut à la fois dépouillé et virevoltant. Sa caméra passe d’un personnage à l’autre dans une farandole d’apartés experts et entraine frénétiquement le spectateur sans pourtant le fatiguer. Car le rythme et la dynamique sont les vraies signatures d’un film qui ne s’accorde presque aucune pause. La première heure est une véritable ode à la musique électronique avec des numéros de danse éblouissants. Puis le réalisateur multiplie les discussions à deux avec des personnages plus complexes qu’il n’y parait pour essayer de brosser des portraits en coupe. Ca parle de mecs, de nanas, de sexe et de légèreté exacerbée. Climax est d’abord une ode à l’humanité avec son casting multiculturel et son empathie galopante. Gaspard Noé fait autant une plongée dans un temps pas si lointain que dans une ambiance artistique. Les danseurs s’apprécient, cohabitent avec bonheur et participent à une ambiance qui chante les louanges de la jeunesse, de l’énergie et du laisser vivre. L’actrice Sofia Boutella sort de The Mummy et Kingsman pour un rôle dans un film d’auteur trash à la limite du hardcore suscitant des émotions vraies.
… qui dérape sérieusement
Et puis l’accident bête, quelqu’un a frelaté la sangria de la fête. Et les masques tombent, les drames s’accumulent et la tragédie se dévoile dans un cercle infernal. Gaspard Noé multiplie des plans séquences qui ont certainement demandé une tonne de préparations. Les drames s’accumulent, personne n’est épargné par les effets secondaires de l’acide versé dans le pot de sangria. Les secrets les plus enfouis se dévoilent, ls tendances cachées se font jour et l’harmonie générale se transforme en joyeuse cacophonie, l’adjectif étant de pure ironie tant le film glace les sangs comme jamais auparavant au cinéma depuis la séance inconfortable du Mother de Darren Aronofksy. La foule est ennemie, les coups bas pleuvent et le danger se cache au détour d’un couloir rendu anxiogène par sa couleur verdâtre. Les effets visuels du réalisateur ajoutent à la symbolique avec cette couleur rouge démoniaque dans la salle de danse autrefois festive et ces plans retournés qui collent les personnages au plafond. L’effet sur le spectateur est boeuf, particulièrement celui qui s’est laissé aller à un « P***** quand même » final qui résume bien le sentiment général. De trip technoïde, on passe au cauchemar le plus noir (rouge?) qui délimite finalement les personnages. Les faux sympas, les vraies enflures et les monstres cachés. Des êtres humains faibles, finalement.
Climax provoque un déferlement d’émotions qui ne peut pas laisser indifférent. Gaspard Noé ne ménage pas le spectateur avec ses scènes à couteaux tirés, ses guerres froides et ses déclarations intempestives. Et la caméra virevolte, avivant les sentiments des spectateurs pour un malaise croissant jusqu’à l’acmé final. Une prouesse, ce Climax est un vrai tour de force cinématographique.
Naître et mourir sont des expériences extraordinaires. Vivre est un plaisir fugitif.
Sortie : le 119 septembre 2018
Durée : 1h35
Réalisateur : Gaspard Noé
Avec : Sofia Boutella, Romain Guillermic, Souheila Yacoub
Genre : Drame, Thriller