Animal est le second long-métrage de la cinéaste grecque Sofia Exarchou après Park en 2016. Les 2 films se ressemblent sur fond de désenchantement existentiel, ici pour l’animatrice de club de vacances Kalia (Dimitra Vlagkopoulou) qui ressent de plus en plus au fur et à mesure du film qu’elle n’a rien au-delà de son job très prenant mais synonyme de vide. Musique, danse, amourettes, elle gravite dans un univers perpétuellement transitoire qui est tout à fait permanent pour elle.
Un film entre rythme et vague à l’âme
La réalisatrice fait longtemps ressembler son film à un documentaire tourné sur une île grecque recevant de riches touristes européens venus de Russie, d’Allemagne et d’ailleurs. Présente depuis 10 ans, Kalia fait presque partie des meubles, elles accueille de nouveaux GO tous les ans et dirige la section danse. Entre beuveries, discussions et animations, le film s’attache surtout à décrire une atmosphère sans qu’une trame narrative se dessine vraiment. Au final, la gaieté semble factice, sur scène et même dans les coulisses, Kalia essaye de vaincre le blues à coups de shots de vodka et d’émotions fortes. Mais rien n’y fait, l’animatrice/danseuse/chanteuse vit une vie transitoire au milieu de touristes de passage, elle ne peut s’attacher à rien, le passage est constant et l’industrie du tourisme de masse s’intéresse avant tout au divertissement obligatoire, pas besoin de profondeur. Véritable critique de la vacuité du système touristique, le film décrit le travail de forçat des animateurs, impliqués jour après jour mais sans vraiment y croire, à l’image de cette animatrice polonaise qui semble jouer le jeu avec un regard perpétuellement perdu dans le vide. L’alcool et les décibels sont bel et bien des succédanés qui ne permettent pas de construire une vie, tout juste participent-ils à s’animer. Car une fois les projecteurs éteints, les touristes partent, la gueule de bois arrive, et les bobos marquent l’âme et le corps. Sofia Exarchou prend le parti de dénoncer un système qui est à la base de l’économie de beaucoup d’îles en Grèce mais au prix de vie cabossées. Le film montre bien que Kalia n’est pas irremplaçable, qu’importe la durée et l’affect, un coup dur peur rapidement la mettre hors jeu et elle sera facilement remplacée.
Le film est empreint d’un spleen qui le rend presque malaisant à cause de la morosité ambiante qui en vient à plomber les personnages, et le spectateur avec. Sans espoir à l’horizon, le film tourne un peu en rond même s’il décrit par le menu un sujet pas sans intérêt. Le film est à découvrir en salles le 17 janvier 2024.
Synopsis: Sous le soleil brûlant d’une île grecque, les animateurs d’un hôtel all-inclusive menés par la charismatique Kalia se préparent pour la saison. Décors en carton-pâte, costumes pailletés et spectacles de danse envahissent la scène. À mesure que l’été avance, la pression augmente, les nuits s’enchaînent, et les démons de Kalia se réveillent. Lorsque les projecteurs s’allument, the show must go on… mais cela a-t-il toujours un sens pour elle ?