Le Lucernaire aime les challenges, le comédien Elya Birman apparemment aussi, car Les Travailleurs de la mer est un vrai choc de théâtre. La pièce est intense, le récit est poignant, l’histoire de Gilliatt, un homme qui à l’instar de Sisyphe doit se battre contre les éléments pour accomplir son destin et secourir une épave menacée d’ensevelissement sous les flots. L’illustre Victor Hugo imagine une histoire qui confine à l’universel et la mise en scène organique de Clémentine Niewdanski est au diapason de la dureté du récit. Le public de la salle Paradis est resté coi devant l’intensité de la pièce.
Une pièce physique
Le contexte est posé dès le départ. Le rustre pêcheur Gilliatt est secrètement épris de la belle Déruchette. Quand le navire à vapeur La Durande s’échoue sur un écueil, le propriétaire du navire Mess Lethierry promet de donner la main de sa nièce Déruchette à celui qui récupérera la machine de l’épave coincée entre les deux rochers de l’écueil Douvres au large de Guernesey. Ni une ni deux, Gilliatt se propose pour réaliser l’impossible, seul contre les éléments, réussissant à récupérer la machine, résistant à la faim, à la soif, à l’épreuve physique, allant jusqu’à combattre une pieuvre belliqueuse. Mais même en ayant réussi sa mission, Gilliatt s’aperçoit à son retour que Déruchette s’est éprise en son absence du jeune pasteur Ebenezer, et que celui-ci l’aime en retour. Gilliatt doit se sacrifier et s’effacer pour le bonheur de Déruchette. Les Travailleurs de la mer est un roman de Victor Hugo écrit à Hauteville House durant l’exil du poète dans l’île anglo-normande de Guernesey et publié en 1866. Le rythme est pesant, le héros Gilliatt doit se battre contre le destin et les éléments, le comédien transmet la souffrance du personnage avec énormément de conviction, il s’ébroue sur scène, il s’époumone, il transbahute le décor, le jeu de lumières concourt à l’abysse existentielle vécue par le pêcheur malheureux. Les spectateurs voient un navire faire de bric et de broc à leur arrivée en salle, tous ses éléments serviront à construire les péripéties du récit, laissant un vrai chantier sur scène à son aboutissement.
L’adaptation est viscérale, le moment de théâtre est éreintant, les spectateurs sortent fourbus de la salle, heureux d’avoir vécu une expérience unique avec un comédien finalement souriant et copieusement applaudi, à découvrir absolument au Lucernaire jusqu’au 17 mars 2024.
Synopsis:
SEUL AU COEUR DE LA TEMPÊTE
Prodigieux chef d’oeuvre de Victor Hugo, ce seul en scène est le récit éblouissant d’un homme poussé au-delà de ses limites. Gilliatt, personnage étrange et isolé, aime en secret une jeune fille à qui il n’a jamais osé parler, et cet amour semble impossible. Un navire fait naufrage. Son propriétaire promet la main de la jeune fille à qui sauvera le bateau. Gilliatt se précipite alors en pleine mer, où la tempête fait rage, pour tenter de secourir l’épave… C’est le début d’une aventure aux périls les plus extrêmes. Véritable performance d’acteur, ce spectacle est une plongée vertigineuse au coeur de la nature humaine et des mystères du monde.
« Ils disaient personne n’ira, c’est impossible… Alors j’y suis allé. »
Détails :
Mardi < Samedi 19h | Dimanche 15h30