Le réalisateur David Perrault place son histoire dans un contexte général bien connu, la guerre de sécession fratricide entre états du nord et du sud dans les jeunes Etats-Unis. C’est une famille française émigrée de longue date qui doit faire le choix de rester au risque de représailles ou de repartir en France, avec les deux parents et leurs trois filles tiraillées entre un mystérieux passeur et une bande d’outlaws sanguinaires. Si L’état sauvage n’évite pas certains écueils, il propose néanmoins une relecture stylisée pour le moins originale du genre Western qui semble bien revenir en grâce.
Des femmes prises au piège de leur destin
Peu de gens savent que la France a détenu pendant longtemps une partie non négligeable de l’Amérique du Nord, jusqu’à ce que Napoléon revende ses parts. Lorsque la guerre de Sécession éclate, il reste un contingent de français ayant choisi l’aventure américaine. David Perrault s’attaque au genre du Western avec une histoire partie sur des bases inédites. Cette famille de négociants en parfum fait le choix de la fuite pour ne pas subir les foudres des troupes nordistes en approche suite à leur ralliement officieux aux troupes sudistes. Le père de famille Edmond (Bruno Todeschini) engage un homme de main nommé Victor (Kevin Janssens) pour mener sa famille vers une embarcation en direction de la métropole hexagonale. Avec eux suivent la femme d’Edmond, leurs trois filles (Constance Dollé et Alice Isaaz, Déborah François, Maryne Bertieaux) et une servante dévouée. Suivis par une bande menée par une femme mystérieuse (Kate Moran), ils traversent les dangers d’une route menée à travers des contrées sauvages. Violence et règlements de comptes parsèment le film de scènes tendues où les personnages ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Une fois le cocon familial quitté, la famille se retrouve en environnement hostile, là où les codes du grand ouest ont tôt fait de régler leur compte aux caractères trop timorés. Le film suit un faux rythme avec d’incessants ralentis accompagnés d’une musique comme à contre emploi, entre chamanisme et messe satanique. Les colons français doivent faire preuve d’endurance pour échapper aux troupes nordistes, aux rançonneurs démoniaques et à la nature sauvage prête à ne leur faire aucun cadeau. Ce deuxième long-métrage du réalisateur David Perrault, après le discret Nos Héros Sont Morts Ce Soir fait écho au récent film de Jacques Audiard, les Frères Sisters, pour souligner l’attrait d’une époque révolue sur les réalisateurs français. Si l’ambiance est placée sous l’égide des grands espaces et des règlements de compte expéditifs, le film n’échappe pas à quelques écueils formels avec des tirades un peu éculées et des situations par trop rocambolesques. Les mystères d’un pays encore nouveau, la quête d’identité de colons bientôt déracinés et des bandits sans visages cachés sous des masques rappelant Leatherface se bousculent dans une intrigue un peu brouillonne qui invoque le fantastique avec cette pensée vaudou enserrant la surface de toutes choses. Des plans visuels superbes sont contrebalancés par un voyage un peu trop romancé avec ces femmes de caractère perdues dans une quête qui les dépasse.
L’affiche invoque un propos féministe qui peine à convaincre. Ceci dit, L’État Sauvage aborde un sujet suffisamment dépaysant pour se prendre au jeu et s’oublier dans un scénario parfois biscornu mais assez envoutant pour tenir en haleine.
Synopsis: Etats-Unis, 1861, la guerre de Sécession fait rage. Une famille de colons français décide de fuir le Missouri où ils vivent depuis 20 ans. Edmond, Madeleine et leurs trois filles doivent traverser tout le pays pour prendre le premier bateau qui les ramènera en France. Victor, ancien mercenaire au comportement mystérieux, est chargé de veiller à la sécurité du voyage….