L’action du film Mahler du réalisateur Ken Russell, grand adepte des biopics de compositeurs illustres (Music Lovers, Lisztomania) se situe en 1911 alors que Gustav Mahler malade ne sait pas qu’il n’a plus que quelques jours à vivre. De retour de son voyage à Vienne, le compositeur atteint d’une immense mélancolie revit les grandes étapes de son existence, enfance marquée par l’antisémitisme de son époque et la violence de son père contre sa mère, amour pour sa femme Alma, conversion au catholicisme pour obtenir la direction de l’orchestre de Vienne et disparition de son frère et de sa fille ainée. Le film grandiloquent est disponible en Blu-Ray pour une redécouverte de l’œuvre de l’illustre compositeur dont la musique accompagne tout le film.
Un biopic fastueux
Ken Russell a toujours considéré Mahler comme l’un de ses meilleurs films grâce à sa grande force onirique et fantasmagorique. La vie de Gustav Mahler ressemble à une tragédie grecque, ou plutôt une tragédie germanique, lui qui est considéré comme un pont essentiel entre le romantisme du XIXe siècle avec Beethoven, Schubert ou Brahms et la musique moderne du XXe siècle. Le grand compositeur a connu notamment Wagner, Freud et Bruckner, ce que le réalisateur évoque via des scènes oniriques fortes en références au judaïsme millénaire du compositeur, au nazisme latent de l’Autriche du début du XXe siècle et à son obsession pour la composition. Le film apprend que Mahler avait consulté Freud pour l’aider à résoudre ses problèmes conjugaux, et que Cosima Wagner (veuve de Richard) était une antisémite notoire qui respectait pourtant Mahler et lui a fait interpréter les opéras de son fils Siegfried. Le film regorge de symboliques mythologiques dans des scènes rentrées dans la légende du cinéma, comme celle où Mahler fait le rêve de sa femme avec son amant l’enterrant vivant, ou celle où Mahler est aux prises avec une Cosima Wagner déguisée en nazie adoubant Mahler lors de sa conversion au christianisme avec force références wagnériennes. Ce type de scènes se fonde sur une mise en scène tout en excès assumé, ce qui est la marque de Ken Russell. Cosima ressemble ainsi à une walkyrie infernale avec son casque de la Wehrmacht, une croix gammée sur le postérieur et des porte-jarretelles sado maso. Les plus férus de Mahler remarqueront ce mélange tout en syncrétisme religieux, entre catholicisme romain, mythologie nordique et carnaval nazi. La référence à l’utilisation de l’Adagietto de sa 5e symphonie dans le film Mort à Venise est rappelé dans une scène qui ressemble à une belle mise en abime.
Russell mettait déjà Tchaïkovski au supplice dans Music Lovers et transformait Liszt en star glam rock dans Lisztomania, ce Mahler ne dépareille pas dans cette trilogie grandiloquente. Mahler exprime son désespoir pour le genre humain dans une œuvre qui a marqué notamment le grand Léonard Bernstein. Le film est disponible en Blu Ray depuis le 27 février 2024 pour un grand moment de cinéma total.
Synopsis: En 1911, alors qu’il ne sait pas qu’il ne lui reste que quelques jours à vivre, le compositeur autrichien Gustav Mahler, très malade, se remémore les grandes étapes de sa vie.