La mécanique de l’ombre : plongée dans les eaux troubles de l’espionnage
C’est un premier long-métrage réussi pour Thomas Kruithof. La mécanique de l’ombre est un film à suspense qui en plus d’une réalisation intelligente, réunit un casting cinq étoiles dont François Cluzet et Denis Podalydès sont la caution célébrité. Sortie en salles le 11 janvier 2017.
L’homme face au système
Duval (François Cluzet) était comptable dans une compagnie d’assurance mais un burnout lui fait prendre la voie du chômage. Depuis deux ans, il lutte non seulement pour retrouver un travail, un « cadre » comme il dirait, mais aussi contre une addiction à l’alcool enfin surmontée. Un jour, une offre aussi inespérée qu’étrange lui est proposée. Clément (Denis Podalydès), homme aussi élégant qu’inquiétant, veut qu’il retranscrive des écoutes téléphoniques dans des conditions très précises dont l’anonymat le plus total. Officiellement, il est toujours au chômage. Officieusement, il gagne 1500€ par semaine ! C’est louche bien sûr mais Duval a enfin un cadre. Il accepte. Contre son gré, il va se faire entraîner dans une sombre intrigue qui le dépasse et aspirer par le système du renseignement intérieur français dont les agents, semble-t-il, ne sont pas uniquement au service du « bien commun » et de la France.
L’homme et le système. Voilà l’obsession de La mécanique de l’ombre. Duval est un pion dépourvu d’intérêts, choisi pour sa rigueur et son insignifiance. Oui, un simple pion dans cette immense partie d’échec obscure, une petite-main et, tôt ou tard, un dommage collatéral qui aura servi une cause plus grande que lui. Il n’est rien mais parfois, il faut se méfier de l’homme qui dort…
Face à Clément, homme sans âme et sans honneur et à Labarthe (Sami Bouajila), affable mais manipulateur, deux grosses pointures du renseignement, Duval va bousculer le système, juste un peu, juste pour survivre. Ce n’est pas un héros, loin de là, mais il refuse aussi d’être une victime. Dans ce jeu de dupes et de manipulations, il ne veut pas être le jouet.
Un film de silence et de suspense
François Cluzet incarne parfaitement cet employé de bureau désœuvré et taiseux. Atout incontestable de la distribution, sa belle performance est appuyée par celles des personnages secondaires. Ainsi, Denis Podalydès (Clément) surprend agréablement en homme puissant et sans moral tandis que Sami Bouajila joue avec justesse un responsable de la DGSI à la sympathie pleine de duplicité.
Servi par ce casting, Thomas Kruithof met les pièces du puzzle en place au fur et à mesure. Le film ne se précipite pas dans l’action, il ne cherche pas à en mettre plein la vue. Non, le but est que l’incompréhension et la peur de Duval s’immisce en nous, spectateurs. Le raisonnement pétri de doutes du personnage s’élabore devant nos yeux et se fait nôtre. Notre cœur bat au rythme du sien et au rythme de la musique. Sa révolte aussi on se l’approprie ou du moins, on la soutient. Parce que c’est sacrément déguelasse quand même d’utiliser les gens comme ça !
Ce monde de l’ombre, de l’espionnage, de la manipulation et de l’illégalité dans lequel se meuvent les personnages est matérialisé par une nuit quasi omniprésente et des lieux vides et impersonnels. Pour mieux devenir fou sûrement. Mais Duval ne sombre pas dans la paranoïa, il essaie de se révolter. La rébellion frontale ne marche pas. Alors, il encaisse, encore et encore, et il observe. Soumission, oppression, frustration puis émancipation. Personne ne craint un employé de bureau au chômage depuis un burn-out et ancien alcoolique en rédemption. Parfois pourtant…
Verdict
Bien ficelé, ce film parle de guerres souterraines, de la problématique actuelle que sont les écoutes mais ce ne sera pas le souci principal du spectateur qui sera surtout préoccupé par la survie du pauvre Duval.
La mécanique de l’ombre, loin des blockbusters d’espionnage glamours et palpitants, nous dévoile un envers du décor imprégné de corruption et de manipulation. Ce n’est pas une invitation au rêve, on patauge plutôt dans une trouble réalité avec injection d’une petite dose de courage pour ne pas désespérer quand même.
Un film brut, solide et à voir.
Deux ans après un « burn-out », Duval est toujours au chômage. Contacté par un homme d’affaire énigmatique, il se voit proposer un travail simple et bien rémunéré : retranscrire des écoutes téléphoniques. Aux abois financièrement, Duval accepte sans s’interroger sur la finalité de l’organisation qui l’emploie. Précipité au cœur d’un complot politique, il doit affronter la mécanique brutale du monde souterrain des services secrets.
Sortie : le 11 janvier 2017
Durée : 1h33
Réalisateur : Thomas Kruithof
Avec : François Cluzet, Denis Podalydès, Sami Bouajila
Genre : Espionnage